endza et esbjörn

Tu marches, lentement, à travers les boutiques. ton regard se pose de temps à autre sur les vitrines, mais ce n'est pas pour ça que tu es venu. pas aujourd'hui. et puis faire les magasins, ça n'a jamais été ta grande passion. toi, tu es un enfant sauvage. sauvage, mais amoureux. amoureux de la femme. alors aujourd'hui, tu n'as pas pu résister à aller chasser, comme tu dis. homme faible, jamais de la vie. tu es fort, fort comme un dieu. et devant toi, tu vois les contours de ta déesse qui entre justement dans une boutique. endza. tu souris devant ce visage familier. tu n'as pas envie de l'interpeller ; tu ne fonctionnes pas comme ça, toi. toi, tu laisses les femmes venir se loger dans tes bras. alors tu attends qu'elle vienne. elles finissent toujours par venir. tu t'appuies contre la façade d'une boutique et à travers la vitre, tu la regardes faire son shopping. ton regard est insistant, pesant même, elle va se sentir observer. tu l'espères, ça t'amuses, toi, l'enfant sauvage.

ah, les leviers de vitesse. qu’y a-t-il donc de plus beau, de plus fin, de plus gracieux, qu’un levier de vitesse ? qu’y a-t-il donc de plus intéressant et utile qu’un levier de vitesse ? ce petit pommeau qui, d’un seul coup d’embrayage permet d’actionner tout le système, et alors en avant pour l’augmentation du couple moteur et de la vitesse. on ne serait décemment plus rien sans ce magnifique levier, qui tient si bien dans la paume de la main. à quoi bon, toutes ces voitures à boîte automatique ? bande de flemmards. ils feraient bien mieux de garder l’authenticité et la pureté des vitesses manuelles, et leur cruelle magnificence. et c’est, absorbée dans mes pensées de leviers de vitesse et mon dessin d’arbre, pignons et engrenages, que je réalise que bientôt se tient l’anniversaire d’une copine de la fac ; s’en vient alors le supplice : faire du shopping, seule. si encore tansy était avec moi pour m’aider à me moquer des pimbêches. mais non. je traîne seule dans les rues de gold coast, écouteurs vissés dans les oreilles. j’entre dans une boutique de fringues, feignant de m’intéresser aux articles. pour mon amie, je peux le faire pour elle. je sens un regard insistant, gênant, et, c’est en me retournant que je remarque esbjörn. je suis alors irrémédiablement attirée vers lui, il m’intrigue bien trop. sorry dear friend for your present, but i’ve tried. really hard. it’s his fault, not mine. ouais, on verra ce qu’elle dira, si je lui sors cette excuse, tiens. quoi qu’il en soit, je retire mes écouteurs, range le tout au fond de la poche de mon manteau, et sors de la boutique pour atteindre ses côtés, un léger sourire aux lèvres. tu m’aimes tant que ça, que tu me suis ? ça me ferait presque peur. je lui chante, l’accent au bord des lèvres.