Il est rarement comme ça. Rarement aussi colérique. Mais là, quand il pénètre dans l'appartement, il a envie de tout casser. Vous savez, il prend les assiettes et les brise au sol. Il attrape les verres, le vase qui traîne là-bas, et les fracasse contre les fenêtres qui explosent à leur tour. Le verre est partout, les éclats écorchent ses joues, écorchent son coeur. Bordel. Priam se réveille en sursaut. Le souffle court, il observe autour de lui. Il est dans son lit – seul dans son lit – et cherche à reprendre lentement ses esprits. Hier soir, il l'a entendu rentrer. Accompagné. Il a essayé de faire taire les bruits qu'il entendait venir d'à côté, de faire taire sa jalousie dévorante. Voilà qu'il en a même rêvé qu'il détruisait tout pour passer ses nerfs. Non, il doit être plus fort que ça. Même s'il n'arrive pas à jouer à l'indifférent, à faire comme si son petit jeu ne le touchait pas. Bordel. Cette fois c'est bon, il est déterminé à ne plus se laisser avoir. Il se lève, en boxer, et va se faire un café, espérant qu'il soit déjà parti ou bien encore profondément endormi. Et surtout, que ce qui lui a servi de conquête a déjà pris la poudre d'escampette, sinon il risque vite de vouloir lui refaire la tête.

Il se sait observé, et il déteste ça, Priam. Il déteste son attitude de fier conquérant. Il serre les dents, sans relever les yeux vers Oslo qui comme à son habitude après une nuit agitée pour lui, l'ignore superbement. Priam s'en fiche. Il est bien déterminé à ce qu'il ne se passe plus rien entre eux. Plus rien du tout. Finalement, il le croise lorsqu'il se lève mais ne bronche pas, attrapant son café pour s'attabler à la table. Ses yeux clairs finissent enfin vers se relever vers ceux d'Oslo. « Tu fais quoi aujourd'hui ? » Ben quoi..? Entre colocataires, on est censé avoir un minimum de communication, non ?

Priam déteste ces lendemains. Il doit bien avouer qu'il déteste ce côte-là d'Oslo : le coureur de jupons. Pire encore, le type qui trempe son biscuit n'importe où. Rien qu'à imaginer ça, ça lui fout le moral à zéro, à Priam. Il déteste la jalousie illégitime qu'il éprouve pour toutes ces conquêtes. La communication semble difficile, et le pompier se passe de réponse en répliquant seulement un « Nan, rien. » dans un soupir profond. Il boit son café, attrapant un journal datant de la veille ou de l'avant-veille. Ses yeux clairs parcourent les titres à la recherche de quelque chose d'intéressant, mais le souvenir qu'Oslo ait passé la nuit avec quelqu'un d'autre le rend malade. Finalement, sans même lever les yeux, il s'entend demander d'un ton rieur : « Alors ça va, ton coup était bien cette nuit ? »

Priam soupire, sans même regarder Oslo. Il cache le fait que ça lui plaise de savoir qu'il a passé une mauvaise nuit en compagnie de cette fille imbibée d'alcool. Le pompier voit bien qu'Oslo est de mauvais poil, du coup, mais ça l'amuse. Après-tout, c'est sa faute; il n'avait qu'à pas ramener cette fille, au pire. Tournant inutilement la cuillère dans son café, il relève ses yeux clairs vers le visage de son colocataire. « T'aurais dû venir me chercher dans ma chambre, je suis sûr qu'il aurait suffit de ça pour qu'elle prenne la poudre d'escampette. » fait-il en plaisantant. Il passe une main dans ses cheveux avant de s'étirer, observant pleinement la réaction d'Oslo.

Il a envie de lui retourner un « bah alors te plains pas » mais avec l'impression de faire la conversation, justement, à un gosse de sept ans, il s'en retient et soupire simplement. Priam lâche un rire bref en entendant la dernière réplique de son colocataire. « Ah bon ? Tu dis ça comme si c'était un théorème inviolable t'sais. Rien n'en porte garantie pourtant. » fait-il remarquer avant de se lever à son tour, posant sa tasse dans l'évier, avant de gagner sa chambre tranquillement. Bien qu'il mente un peu, et il le sait. C'est frustrant, pour lui, d'avouer qu'il ne saurait pas lui résister.

Priam se débarrasse de son t-shirt, le jetant dans la corbeille de linge sale placée dans un coin de sa chambre. Il se dirige vers la salle de bain dans le but de prendre une douche pour se réveiller vraiment, mais revient dans sa chambre se prendre une serviette. Il fronce les sourcils en voyant Oslo à l'encadrement de la porte, se demandant encore ce qu'il veut. S'il veut parier ? Ça a un goût de défi, là. Priam le dévisage lentement. « Ça dépend ce que tu veux parier, Oslo. » murmure-t-il sur le même ton, ne sachant pas vraiment si son colocataire est réellement sérieux, et s'il veut tenter de prouver qu'il a raison. Dans ce cas-là, Priam n'a qu'une seule chose à faire – rien que par fierté et contradiction : résister.

Une invitation au resto ? Ça lui va, à Priam. Au pire donc, ça sera lui qui l'invitera, c'est ça ? Oui parce qu'il faut bien être réaliste, et c'est ce qu'il est, Priam. Il peut résister, tout comme il y a des chances qu'il n'y parvienne pas. Mais pas question de se dégonfler. Il le voit s'approcher et hoche alors la tête, attrapant sa main pour la serrer en signe d'approbation. « Marché conclus. » finit-il par dire, récupérant sa main pour croiser les bras, le défiant du regard sans bouger. Son air aguicheur ne lui dit rien qui vaille...

Toute la matinée ? Priam hoche la tête. De toute façon, il n'est pas très tôt, donc ça ne veut pas dire beaucoup. Il l'observe, toujours les bras croisé, passer devant lui. Il soupire, forcément, fallait qu'il tente le coup de la douche. En même temps, lui dire qu'il la prend plus tard, ça ferait vachement dégonflé. Alors, d'un air totalement naturel, le pompier hoche la tête. « Ouais, c'est bête hein ? » fait-il en entrant sans gêne dans la salle de bain avec sa serviette, se débarrassant de son short pour se retrouver alors seulement en boxer, toisant Oslo du regard, comme pour lui montrer que ce n'est pas ça qui va l'empêcher d'aller se doucher tranquillement.

Il ne sait pas vraiment dans quoi il s'engage, ni même s'il veut réellement le savoir en fait. Il l'observe d'un oeil presque méfiant retirer son jogging, et Priam se mord discrètement la lèvre inférieure. Sans sortir de la salle de bain, il reste là, à le regarder de dos, à détailler les muscles de ses épaules, ses omoplates, ses bras, ses fesses... Sans bouger. Il sourit à la question d'Oslo, bien que celui-ci ne puisse, heureusement, pas le voir. « Hmm.. sans doute assez longtemps pour qu'on tienne encore un peu. » siffle-t-il d'un air malicieux, bien que gêné par l'impudeur qu'à son colocataire à parler de leurs nombreuses fois sous les draps.

Comment est-ce qu'il est censé rester impassible à un sourire comme ça, hein ? Priam soupire, et garde son boxer pour entrer à son tour dans la cabine de douche – heureusement spacieuse. Après une légère hésitation, il s'empare du gel douche que tient Oslo, pour en prendre un peu dans sa main et poser celle-ci sur l'épaule de son colocataire. Il commence timidement à lui masser les omoplates, sa deuxième main s'y rajoutant, pour finalement parcourir tout son dos. Il doit résister à l'envie de lui déposer quelques baisers dans la nuque, mais il a parié.

Il le sent frissonner et quelque part, ça lui fait plaisir, à Priam. Ben oui, c'est toujours rassurant de voir qu'il lui fait son effet aussi. Il continue tranquillement, quand Oslo se tourne face à lui. Son torse vient se coller au sien et Priam retient sa respiration, sentant son rythme cardiaque s'accélérer impulsivement. Enlever ça ? Non, pas encore. Le pompier ne répond rien, sentant la main mouillée de son colocataire tracer des sentiers incandescents sur son torse, puis remonter peu à peu jusqu'à se crocheter à sa nuque. Priam baisse les yeux pour les poser sur les lèvres d'Oslo, mais il ne fait rien, esquissant un sourire sans bouger. Ses mains viennent se poser de nouveau sur les épaules, puis les bras d'Oslo, continuant avec l'excuse de le savonner. Il se sent bien, là, contre lui, et c'est ça qu'il déteste.

Il est impatient, le Oslo, ou peut-être est-ce juste pour gagner son pari plus vite. Hors de question pour Priam d'abandonner maintenant, même s'il a conscient qu'avec sa main traînant si près de son boxer, ça va être rudement dur. « On devait se doucher à la base, non ? » fait-il alors en le regardant, jouant à l'insensible même si son corps commence à crier autre chose. Il s'avance alors pour pousser un peu Oslo, à l'aide de son propre corps, torses contre torses. Il pose une main sur sa hanche pour le garder contre lui par la même occasion, et une fois sous le jet tous les deux, il l'allume de nouveau, laissant l'eau se déverser sur leurs deux corps.