Les rayons du soleil ricochaient sur les vagues légères, venant aveugler le serbe. Sa planche entre les jambes, il se laissa porter par le courant, dérivant surement vers la plage. Comment il s'était retrouvé là déjà ? Il s'était encore fais avoir par un de ces vendeurs. Et il fait chaud, et il faut profiter de la mer, et le surf en Australie... Et ce connard qui s'était barré à peine Apollinaire à l'eau. Pourtant, rien qu'à sa peau blanche, on pouvait deviner qu'il n'était pas très fort en surf, voir même nul. Comment revenir à la plage ? C'était la question à laquelle il réfléchissait depuis bientôt une demie-heure, le soleil ayant rendu la peau de son dos écarlate. Mais, petit à petit, le courant le ramenait vers la plage. Merci les marées ! Apollinaire n'eut pas le temps de réfléchir à comment prendre une vague en surf qu'une masse énorme d'eau vint le submerger, l'enroula, le malmena avant de le jeter sur la plage comme on jette une vieille télé aux encombrants : le serbe se retrouvait étalé sur le sable, trempé et gémissant de douleur, arrivant tout de même à lâcher quelques jurons.

Tout le monde le sait, le sport préféré des australiens c’est le surf. Sauf que ce n’est pas aussi facile que ça en à l’air et j’étais bien placée pour parler ! Depuis mon plus jeune âge j’avais essayé et malgré mes nombreuses tentatives, je n’arrive toujours pas à tenir plus de deux secondes debout sur la planche. Du coup, lorsque j’ai vu ce garçon s’échouer sur la plage après avoir essayé tant bien que mal de revenir sur la terre ferme, je n’ai pas pu m’empêcher de rire. Pas pour me moquer -je suis bien pire que lui- mais par compassion. Et oui, je l’avais remarqué depuis un petit moment. Pourquoi est-ce que vous croyez que je viens souvent bronzer ici alors que ce n’est pas les plages qui manque ici ? Parce qu’ici, la plupart des hommes, des vrais je veux dire pas ceux qui ont dix-sept ans, viennent passer l’après-midi lorsqu’ils ne travaillent pas. Je me lève donc de ma serviette et marche droit vers lui, cheveux au vent. Autant le dire tout de suite, ça ne fait pas le même effet. « Généralement quand on sait pas surfer, on se lance pas seul avec une planche dans le grand bain ! » Ce n'était pas méchant, j'avais juste ce besoin de dire ce quelque chose même si c'était inutile et ce, tout le temps.

Le sable mouillé collait à ses cheveux alors que sa poitrine se levait difficilement à cause de la douleur. Bordel, cette vague lui avait mis une raclée comme personne. Même son père était plus clément avec lui. Le serbe n'eut pas le temps de se relever, histoire de sauver les apparences, qu'une petite brunette, cheveux au vent, s'approcha de lui. « Généralement quand on sait pas surfer, on se lance pas seul avec une planche dans le grand bain ! » Apollinaire grommela, se redressant légèrement en s'appuyant sur ses les coudes. Le soleil l'aveuglait. « J'étais censé avoir un prof, mais ce connard est parti. » Voila, c'était pas de sa faute s'il était nul, il y avait l'intention. Mais même le destin était contre lui pour toute pratique sportive, ne manquait plus que son souffle au cœur se déclenche. Apollinaire finit par se relever, secouant ses chveux pour en enlever le sable et l'eau, aspergeant par la même occasion la jeune fille « pardooooon » dit-il avant de regarder autour de lui, hésitant. « Bon. Bah j'ai perdu ma planche. » Super !

Visiblement ce n’était pas de sa faute s’il s’était retrouvé seul sur une planche en plein milieu de l’océan alors qu’il ne sait absolument pas surfer. C’est ce qu’ils disent tous en fait mais peu importe. C’est de la faute du prof de toute façon. « Et j’imagine qu’il a attendu que tu sois loin de la rive pour se barrer ? » Il avait l’air drôle du moins jusqu’à ce qu’il secoue ses cheveux dans tous les sens et qu’il m’envoie de l’eau en plain de le visage. Heureusement pour lui qu’il s’était tout de suite excusé, tout le monde sait que c’est désagréable comme sensation. Puis il regarda autour de lui avant d’affirmer qu’il avait perdu sa planche. Perspicace, non vraiment je n’ai rien d’autre à ajouter. « En même temps vu comme t’as atterri sur le sable… Je veux pas dire mais tu la retrouveras jamais ta planche ! »  J’avais vu toute la scène, dommage pour lui ce n’était pas passé inaperçu. Et je ne pense pas être la seule à avoir remarqué sa chute. Enfin bon, ce n’est pas nécessaire de lui en faire part. « Au fait, comment tu t’appelles ? » Je ne donnais jamais mon prénom en premier, question de principe.

 « Et j’imagine qu’il a attendu que tu sois loin de la rive pour se barrer ? » Apollinaire hocha la tête. C'était exactement ça. Encore un mec qui arnaquait les touristes, un connard qui se faisait du blé sur les agneaux qu'il allait égarer dans les forêts. « En même temps vu comme t’as atterri sur le sable… Je veux pas dire mais tu la retrouveras jamais ta planche ! - oh meeeeeeerde. » dit-il, enfonçant les mains dans les poches de son caleçon de bain. « Tu sais ça coute combien ces conneries ? » lâcha-t-il, les yeux dans le vague, comme s'il était happé par cette réflexion soudaine. Bah oui, même si on l'avait abandonné lâchement, il allait falloir la repayer cette planche. Une fortune sûrement. Heureusement que l'argent n'était pas un problème pour lui. « Au fait, comment tu t’appelles ? »  Apollinaire regarda la jeune brune, comme frappé par la révélation. Quel goujat il faisait la. « oh pardon mademoiselle. Apollinaire Smirnov, pour vous servir. » dit-il en se courbant légèrement, par habitude. « Et toi ? » dit-il en haussant les sourcils, se penchant légèrement vers elle pour mieux entendre la réponse. Ça l’intéressait quand même.

Apparemment ce n’était pas une blague, il s’était vraiment retrouvé tout seul dans l’océan livré à lui-même. Maintenant il était bon pour repayer la planche qu’il avait perdu. « Hmmm… La peau du cul je pense. » Ce n’était pas très rassurant mais malheureusement pour lui, c’était bel et bien la vérité. Raison pour laquelle j'évitais de faire du surf, j'étais un vrai danger public alors je vous laisse imaginer le nombre de planches que j'aurais du racheter. Heureusement que j'avais fais une croix sur le surf dès la seconde séance. « Pour me servir ? Tu devrais pas dire des choses comme ça, j'ai plein d'idées qui me viennent en tête après. » Ce n'est pas drôle je sais mais je n'y peux rien. Je lui adresse un clin d'oeil avant de me présentent à mon tour. « Aylana Fields. »

« Hmmm… La peau du cul je pense. » Bien sûr, un truc de cette taille là ça valait son pesant en or. Ils devaient pas se faire chier au magasin de location avec des bijoux pareil. « Pour me servir ? Tu devrais pas dire des choses comme ça, j'ai plein d'idées qui me viennent en tête après. » Apollinaire esquissa un sourire face au sous entendu de la jeune femme. « J'aimerais bien savoir quel genre d'idée... » dit-il, sans vraiment savoir quoi penser. Après tout, c'est dur de cerner quelqu'un après avoir échangé seulement trois mots et comme la brunette avait quand même l'air plus jeune que lui, il voulait pas se risquer à finir enfermer pour harcèlement sexuel sur mineur. On sait jamais. « Aylana Fields. » dit-elle, après avoir fait un clin d’œil. « Enchanté. Tu es australienne ? » demanda-t-il, intéressé. Après tout, si elle vivait ici, elle pourrait toujours lui filer des bons coins où sortir ou des trucs dans le genre.

Il est drôle. Il fait comme s’il n’avait pas compris ce que je voulais dire. Tant mieux comme ça je vais pouvoir lui montrer ce que je voulais dire par « j’ai plein des idées qui me viennent en tête ». C’est le meilleur moyen pour lui de comprendre de toute façon même si derrière son côté innocent il sait très bien de quoi je veux parler. « Je me ferais un plaisir de te le montrer mais je pense pas que ce soit l’endroit approprié pour, tu comprends ? » Ne faites pas semblant d’être choqué, nous savons tous que vous ne l’êtes pas. « Moi de même. Oui je suis australienne, ça se voit tant que ça ? » Il suffit d’écouter l’accent en fait. Il faut vraiment que j'arrête de parler sans réfléchir moi. Un jour je vais me faire avoir en beauté. « Et toi tu viens d’où ? » Les accents et moi ça faisaient cinquante. J'étais incapable de les reconnaître à part les plus marquant comme ceux des pays de l'Est ou encore la France.

La petite brunette semblait savoir où elle allait. « Je me ferais un plaisir de te le montrer mais je pense pas que ce soit l’endroit approprié pour, tu comprends ? » Un sourire en coin apparut sur le visage du serbe, qui enfonça un plus profondément ses mains dans ses poches, ce qui lui fit hausser les épaules. Ça le gênait. Ça l'avait toujours gêné qu'une fille lui fasse des allusions, alors que d'habitude c'est lui qui trimait pour espérer ne serait-ce qu'un regard. « Moi de même. Oui je suis australienne, ça se voit tant que ça ? - Oh non, non, c'était juste comme ça, histoire de savoir d'où pouvait venir une aussi jolie fille. » lâcha-t-il avec un petit sourire. Lamentable, LA-MEN-TA-BLE, voila, comme ça s'était dit. Il était toujours nul avec les filles, et puis avec n'importe qui d'ailleurs. C'était plus que la barrière de la langue à ce point là, c'était de la constipation émotionnelle.  « Et toi tu viens d’où ? - Serbie ! » renchérit-il, content qu'elle change de sujet. « Enfin j'ai déménagé assez jeune en France en fait, mais quand je parle français j'ai toujours mon accent serbe. Et quand je parle anglais je parle juste mal en fait ! » dit-il en laissant échapper un petit rire. S'il avait par l'air d'un con fini là.

On ne pouvait pas dire qu’il avait fait preuve de beaucoup d’imagination mais un compliment reste un compliment, n’est-ce pas ? Du coup je me contente de lui sourire. Qu’est-ce que je pouvais bien dire de toute façon ? Serbie. Il me fallut quelques secondes avant de visualiser à peu près où est-ce que ça se situait. En revanche pour la France je n’avais pas eu de mal, encore heureux d’ailleurs. « Ca va, tu te débrouilles bien quand même. Puis vois le bon côté des choses, ça a son charme, ça rend tout de suite plus attirant. » Ca marche avec les anglais qui parlent français et les français qui parlent anglais donc tout compte fait ça marche tout le temps. Bon peut-être pas avec l’accent chinois ou japonais tout compte fait. « Donc tu viens de Serbie. Pourquoi avoir quitté la France pour l'Australie ? Si c'est pas trop indiscret. » Parce que question indiscrétion je suis pas mal !

Elle sourit, c'est qu'il ne devait peut-être pas être si maladroit que ça finalement. Quoi que, si il y regardait de plu près, c'était plus un sourire par défaut, histoire de pas plomber l'ambiance. Il était nul. « Ça va, tu te débrouilles bien quand même. Puis vois le bon côté des choses, ça a son charme, ça rend tout de suite plus attirant. - Merci » dit-il, sans vraiment savoir si elle faisait un constat général ou si elle parlait de lui. « Donc tu viens de Serbie. » Il hocha la tête de haut en bas.  « Pourquoi avoir quitté la France pour l'Australie ? Si c'est pas trop indiscret. » Il hésita un petit moment avant de répondre. Non ce n'était pas indiscret, il essayait juste de trouver de la forme à ses propos, histoire de ne pas balancer qu'il était juste venu ici en vacances h24, comme un gros flemmard. « Ben... En fait... Mon rythme de vie me plaisait pas trop la bas, j'avais... des mauvais souvenirs disons. » Il fit une petite moue triste en pensant à Marie et à son triste quotidien à Deauville. « A cause de mon... euh... » Il hésita à le dire « ...travail, j'ai beaucoup voyagé en très peu de temps, donc j'ai voulu me trouver un vrai chez moi. La mer, le beau temps, c'est tout ce dont je rêvait qu'en l'hiver était là en Serbie. Alors je suis là ! » dit-il, un petit sourire au lèvres. « Et toi, pourquoi t'es pas partie ? » Ouais, ça pouvait avoir l'air bête comme ça, mais pour Apollinaire c'était une question totalement normale. Pour lui, l'endroit où on avait grandit s'apparentait à une prison, et partir était le seul moyen de briser ses chaines.

S’il voulait se poser, il n’y avait pas mieux que l’Australie. Bon d’un autre côté je ne suis jamais partie plus de deux semaines dans un autre pays que mon pays d’origine donc je ne peux pas vraiment comparer. En tout cas j’étais bien ici. Il parle de mauvais souvenirs, je veux bien le comprendre. Si j’en avais énormément je serai surement partie. Mais j’ai de la chance, ce n’est pas le cas. Quand il se met à parler de son travail, il éveille en moi de la curiosité. Je lui aurai bien demandé ce qu’il faisait mais ça faisait beaucoup de questions en très peu de temps. « C’est vrai qu’on a pas trop à se plaindre au niveau du temps. Puis on s’ennuie pas non plus. » J’allais citer plusieurs activité possibles dont la plus connue, le surf, mais avec ce qui lui était arrivé avec sa planche j’allais éviter. « Disons qu’entre le divorce de mes parents et mon gros problème de santé j’en ai pas eu l’occasion. Mais je me plais bien ici alors je pense pas partir de si tôt. » Je pourrais tout laisser tomber et partir maintenant mais je me voyais mal faire ça. Je suis imprévisible mais pas à ce point quand même. Un jour peut-être.

« C’est vrai qu’on a pas trop à se plaindre au niveau du temps. Puis on s’ennuie pas non plus. » C'est vrai que niveau temps, Apollinaire était ravi même si sa peau toujours aussi blanche ne voulait pas prendre les couleurs locales. De toute façon, il n'était pas venu pour bronzer, mais pour se reposer, même si ce coin de l’Australie était assez vivant. Il n'avait pas eu le temps de s'ennuyer malgré tous ses efforts pour. « Disons qu’entre le divorce de mes parents et mon gros problème de santé j’en ai pas eu l’occasion. Mais je me plais bien ici alors je pense pas partir de si tôt. - Ah oui tout de suite... » Le divorce des parents, il ne pouvait pas savoir. Quand maman meurt, la question du divorce ne se pose plus réellement. Mais la maladie, il connaissait et c'est vrai que ça l'avait empêcher de vivre pas mal de temps, un truc aussi débile qu'un souffle au cœur. « Si jamais ça te tente de partir, hésites pas à m'appeler. Devrait pas y avoir de raison pour changer d'air. Au contraire. » Et ouais, l'aventure bébé, ça se décide pas, ça se vie. Ou un truc du genre.

Oui, c’est tout de suite plus compliqué d’organiser un voyage quand on doit passer le plus clair de son temps à l’hôpital. Peut-être pas tous les jours, du moins pas au début. Je pourrais le faire maintenant par contre, pourquoi pas ? Surtout quand il propose de partir avec moi. Je dois bien avouer que c’est un bon moyen pour me motiver. « Je dois comprendre par là que t’as envie de me revoir ? » Plutôt direct, en effet. Je n’ai pas pour habitude de passer parce quatre chemin, j’y vais toujours au culot donc si ça marche tant mieux sinon ce n’est pas grave, je vais pas mourir à cause de ça. Ca me vexe sur le moment mais je reste debout et passe à autre chose. Enfin. Après lui avoir sourit une nouvelle fois, je reprends mon sérieux. « En tout cas merci, j’y penserai ! » Je comprends mieux pourquoi je mets beaucoup de gens mal à l'aise. Si je n'étais pas comme ça et que je rencontrais une personne comme moi, je prendrais peur.

Pour peu de choses, Aylana rappelait à Apollinaire les quelques parisiennes qu'il avait fréquenté quand il était encore en France. Sures d'elles, taquines et presque moqueuses dans leur façon de se tenir. La petite australienne était un peu tout ça à la fois, en mois pétasse. Ça lui avait presque manqué. « Je dois comprendre par là que t’as envie de me revoir ? » Le serbe eut un rictus, préférant détourner le regard. Il n'était pas du genre timide, mais toujours mal à l'aise quand ce n'était pas lui qui faisait du gringue.   « En tout cas merci, j’y penserai ! - De rien, c'est normal...» Il se dandina légèrement sur place, enfonçant ses pieds dans le sable encore mouillé alors que la mer commençait à se retirer.Le soleil ne se couchait pas encore mais chutait déjà vers l'horizon alors qu'un petit silence gênant s'installait entre eux. Il fallait qu'il trouve quelque chose à dire avant que l’atmosphère deviennent trop lourde... « Tu veux peut-être boire quelque chose ? »

Toujours pas de réaction. Soit il a un problème avec les filles en général, soit il a un problème avec moi soit il a un problème avec les relations humaines et plus particulièrement celles entre les hommes et les femmes. J’hausse légèrement les épaules, tant pis pour lui après tout. Maintenant je dois bien avouer que je n’ai aucune idée de ce que je pourrais bien dire. « Oui, pourquoi pas. » Je ne devais pas froide mais je ne savais plus comment me comporter avec lui. D'habitude ce n'est même pas à moi de faire le premier pas comme je l'ai fais plusieurs avant, ça se fait tout naturellement et ça vient des deux côtés. Sauf que cette fois-ci ce n'est pas le cas. Cependant je lui souris toujours, s'il peut éviter de remarquer le léger mal aise qui venait de s'installer de mon côté, ce n'était pas plus mal.

Apollinaire eut une légère moue alors qu'Aylana haussait les épaules. « Oui, pourquoi pas. » Elle avait un petit sourire, un peu faux, qui finit d'achever le serbe. Il était nul. « Je suis désolé de plomber l'ambiance comme ça. » laissa-t-il échapper sans vraiment y penser. Oh et puis tant pis. « Avant tu vois j'étais le mec drôle j'arrivais à faire rire les filles mais en ce moment je sais pas... » Il soupira, croisa ses bras et plongea son regard dans celui de la petite brune. Il se sentait vieux et, malgré tous ses efforts, il était toujours malheureux. Pourtant il avait tout fait pour avoir la vie qu'il voulait : il avait de l'argent, du temps libre au soleil, il était loin de Marie. Tout ce dont il avait rêvé avait finit par le détruire à petit feu. «Je devrais pas t'embêter avec tout ça, c'est juste que beaucoup de choses ont changés ces derniers mois... Allez, allons boire ce verre ! » dit-il subitement en attrapant la jeune fille par les épaules, l'emmenant vers la ville, au premier bar qu'ils croiseraient. Un bon verre, c'était toujours la solution.

Malgré mes petits efforts pour cacher mon mal aise, il s'en rendit compte. Je ne dois vraiment pas être une bonne comédienne. Ce n'était pas de sa faute, disons que je n'ai pas l'habitude de ce genre de situation. Étant extravertie, les choses se font d'elles-mêmes, les liens se tissent tous seuls au fur et à mesure. Seulement là je ne sais pas trop comment me comporter. Pour être honnête, je n'arrive pas à le cerner.« Non c'est pas toi, c'est juste que j'ai pas l'habitude de ce genre de situations. D'habitude j'ai pas à faire le premier pas, ça se fait tout naturellement sans que j'ai à dire quelque chose ou presque.» J'ai conscience que ça fait très superficiel mais je n'ai pas dit ça dans ce but là, dans le but de me mettre en avant.« T'inquiète pas, je comprends. Oui, allons-y !» Il fallait parler d'autre chose maintenant, c'est compliqué dans sa vie apparemment alors autant lui changer les idées.

Le sable encore chaud réchauffait ses pieds alors qu'il se dirigeait, sans vraiment savoir, vers la ville. « Non c'est pas toi, c'est juste que j'ai pas l'habitude de ce genre de situations. D'habitude j'ai pas à faire le premier pas, ça se fait tout naturellement sans que j'ai à dire quelque chose ou presque.» Apollinaire hocha la tête. C'était pareil pour lui, timide jusqu'à ce que le premier éclat de rire fuse et ne le fasse devenir une vraie pipelette. Mais avec tout ce qu'il avait dans la tête en ce moment, c'était plus compliqué. « T'inquiète pas, je comprends. Oui, allons-y !» à ces mots, Apollinaire resserra son étreinte sur les épaules de la jeune fille. Non, ce n'était pas une technique de drague foireuse, c'est parce que l'attention d'Aylana le touchait. Après tout, elle aurait très bien pu partir en courant ! Apollinaire se frappa le front en arrivant sur le bitume, alors qu'un barse dressait devant eux. « kurva ! » lâcha-t-il en serrant les dents et enfonçant ses mains dans ses poches, vides. « J'ai tout laissé chez moi... » dit-il en soupirant... Ni téléphone, ni argent, rien, il avait eu trop peur que tout cela ne prenne l'eau - et, il avait eut raison. « J'suis vraiment nul aujourd'hui ! Tu veux peut-être qu'on se donne rendez-vous plus tard ou qu'on passe chez moi ?... » Hors de question qu'elle paye. Ce n'est pas parce qu'il était nul en relation humaine qu'il n'en était pas moins bien éduqué.

Bien que nous n’ayons pas forcément évoqué les passages les plus amusants et les plus intéressants de nos vies respectives, je m’amusais bien. Il était drôle sans même essayé de l’être plus il faut bien l’avouer, il est attachant. Disons qu’il a l’air d’être quelqu’un de bien mais étant donné que je me trompe fréquemment sur les personnes que je rencontre, je ne préfère pas me prononcer là-dessus. Je grimace lorsqu’il prononce un mot que de toute évidence je ne comprends pas. Soit j’ai mal compris, soit ça ne veut rien dire du tout soit c’est une autre langue. C’est surement ça, oui. J’ai tendance à partir au quart de tour, il suffit d’une phrase ou d’un mot mal interprété ou bien trop interprété justement, pour que je me fasse toute une scène. Que ce soit pour quelque chose de bien ou au contraire de mauvais, je m’enflamme directement. Et c’est peut-être bien le cas aujourd’hui encore. « C’est bon je peux payer tu sais, ça va pas me tuer. » Surtout que ce n’est pas pour me venter mais on ne peut pas dire que je manque d’argent, loin de là. « On va faire un truc. Je paie pour cette fois et si on passe un bon moment, si on s’amuse bien et si on rigole bien alors je te donne le droit de m’inviter où tu veux et tu paieras toi. Ca marche ? » J'affiche ensuite un sourire pour le moins amusé.

Ça le gêne horriblement, il en devient presque rouge alors que ses oreilles commencent à le bruler. « C’est bon je peux payer tu sais, ça va pas me tuer. » De ses mains il se couvre le visage, toujours honteux. Décidément, ce n'était pas sa journée. Elle le retrouve d'abord en mauvaise posture à la plage et il continue les bourdes. « On va faire un truc. Je paie pour cette fois et si on passe un bon moment, si on s’amuse bien et si on rigole bien alors je te donne le droit de m’inviter où tu veux et tu paieras toi. Ca marche ? » Il écarte les doigts afin de voir la petite brune qui le regarde avec un sourire amusé. Il n'allait quand même pas tout gâcher pour ça, alors que s'était si bien reparti. « D'accord. » lâcha-t-il dans un soupir après une légère réflexion. « Maiiiiiiis ! » dit-il en posant une main sur sa hanche et de l'autre, pointa son doigt vers le ciel pour bien faire comprendre le sérieux de ses propos. « Pour me faire pardonner d'avance... Et bien je ne sais pas encore, mais je ferais plus qu'inviter la prochaine  fois. » Il finit par se caresser le menton, l'air pensif. « Je trouverais Aylana, je trouverais... » Il essaya de garder un air sérieux mais laissa échapper un petit rire. Il ne savait pas trop pourquoi, mais la spontanéité de la jeune fille le mettait à l'aise.

J’avais dit qu’il avait l’air drôle et une fois de plus, je ne m’étais pas trompée. Sa gestuelle et sa façon de se tenir me faisait rire. Heureusement qu’il a accepté mon marché sans broncher sinon nous serions partis dans un débat qui n’aurait jamais cessé. Comme je lui avais dis, ce n’est pas le fait de payer trois ou quatre verres qui allait me tuer. En premier lieu, je le regarde en faisant mon maximum pour ne pas rire mais au final, je finis par exploser. « J’en doute pas une seconde ! » Je l’attrape ensuite par l’avant bras et l’attire en avant histoire de se rendre dans le premier bar que l’on trouverait. « Allez viens, t’auras tout le temps de penser à ce que tu pourras faire en plus de m’inviter pendant qu’on descendra nos verres ! » En réalité, ça lui prendrait encore plus de temps mais peu importe, il finirait par trouver un jour ou l'autre même si, je dois bien le dire, je suis curieuse de savoir ce qu'il a derrière la tête. Si ça avait été quelqu'un d'autre, j'aurais eu toutes les raisons de me faire des films. Seulement avec lui j'avais déjà tâté le terrain et c'était déjà perdu d'avance. Néanmoins j'allais passer un bon moment.

Elle finit par rire, de bon cœur, ce qui réconforte Apollinaire. Ça commençait enfin à accrocher. « J’en doute pas une seconde ! »  Aylana l'attrape par le bras et le tire vers l'avant, décidée. Décidément, c'était un sacré petit bout de femme, plein d'énergie. « Allez viens, t’auras tout le temps de penser à ce que tu pourras faire en plus de m’inviter pendant qu’on descendra nos verres ! » Il laisse échapper un autre petit rire alors qu'il se laisse toujours guider par l'australienne. Le soleil qui se couche au loin et l'air toujours chaud lui laisse présager une bonne soirée, tranquille et, d'un certain côté ça lui fait du bien. « Ça faisait longtemps tu sais... » il laissa sa phrase en suspens, continuant de marcher sans vraiment faire attention à ce qu'il se disait, ni à l’ambiguïté que cela pouvait créer. « Enfin, que j'ai rencontré quelqu'un je veux dire !» Il était tellement maladroit. « C'était pas pareil en France. Les gens changent vraiment selon les pays... UN BAR ! » dit-il en s'arrêtant net, pointant du doigt droit devant lui l'endroit tant convoité. Il attrapa Aylana par la main et commença par courir vers le dit-bar, pressé, sans vraiment savoir pourquoi.  

Je comprenais tout à fait ce qu’il voulait dire, en fait je me trouve dans le même cas que lui si ce n’est pas pire. Et en effet, à la longue ça devenait pour le moins pesant. Pourtant, d’habitude avec mon assurance et mon côté extravertie, je n’ai pas de problème à faire de nouvelles rencontres. A croire que j’étais maudite en ce moment. « Non ?! Sérieusement ? Tu vas pas me faire croire qu’avec cette tête-là et ce corps-là personne n’est venu vers toi ? » Malheureusement j’ai tendance à parler un peu trop vite et à dire des choses qui ne devraient pas nécessairement être exprimées à voix haute. Cependant, une fois que c’est dit, c’est dit, je ne peux plus revenir en arrière. Du coup je reprends assez rapidement : « Enfin ce que je voulais dire c’est que je te comprends, j’ai l’impression d’être invisible aux yeux de tous ces derniers temps… » Il commença une autre phrase puis se stoppa net et par miracle, il pointa un bar du doigt. Heureusement qu’il était là parce que je ne l’avais même pas remarqué. Il était tellement pressé de boire qu’il m’attrapa par la main et se mit à croire et je fus donc bien obligée de faire de même. Dans le fond ce n’était pas dérangeant. Une fois à l’intérieur, je pris place devant le comptoir plus rapidement que je n’aurais cru, il faut croire que ça me tenait à cœur. « Bon alors, qu’est-ce que tu veux Apollon ? » Apollinaire, Apollon, dans le fond ça se ressemble. Puis c’est le premier truc qui m’est venu en tête quand j’ai appris son prénom.

La bonne humeur et la spontanéité d'Aylana semblait sans fin. « Non ?! Sérieusement ? Tu vas pas me faire croire qu’avec cette tête-là et ce corps-là personne n’est venu vers toi ? » Apollinaire eut un petit air gêné, se passant anxieusement la main dans les cheveux. Peut-être que les australiennes n'étaient pas assez habitués à voir des blancs becs pour les trouver attirants, mais dans la grisaille parisienne, il était un mec parmi tant d'autres. « Enfin ce que je voulais dire c’est que je te comprends, j’ai l’impression d’être invisible aux yeux de tous ces derniers temps… » Elle n'eut pas vraiment le temps de finir sa phrase qu'Apollinaire l'avait entrainé vers le bar, mais elle fut la première derrière le bar. « Bon alors, qu’est-ce que tu veux Apollon ? » Il eut un petit sourire avant de se mettre lui aussi sur un des tabourets du bar « Pour moi ce sera un petit russe blanc, et toi Athéna ? » bah oui, il fallait bien équilibrer la balance un petit peu ! « T'inquiètes, si tu bois trop, je te ramène ! » Apollon/Sam ça ne se ressemblait pas trop, mais bon !