Tu te tournes, te retournes, tentes de trouver une position confortable et apaisante, mais rien n’y fait, t’arrives pas à dormir. Ce n’est pas la première fois que ça t’arrives, ça arrive même souvent ces derniers temps. Ce n’est pas que tu trouves le lit inconfortable, non, tu n’es pas exigeante là-dessus. Ou plutôt tu ne peux pas te permettre de l’être, on t’offre bien gentiment le logie, tu ne vas pas aller de plaindre encore en plus. Tu préfères un endroit douillet à dormir dans la rue comme ça t’arrive certains soirs. Comme tu sais que ça ne sert à rien de continuer à gigoter dans ce lit en attendant que le sommeil arrive éventuellement, tu te lèves et va dans la cuisine. Tu tentes de faire le moins de bruit possible, tu ne voudrais pas réveiller ton hôte et sa fille. Tu veux passer inaperçu, faire comme-ci tu n’existais pas. Tu y parviens bien en général, tu arrives à ne pas te faire remarquer et c’est une qualité que tu apprécies chez toi. Tu ouvres la porte du frigo et prends la bouteille de jus d’orange. Tu laisses la porte ouverte et fixe la lumière blanchâtre qui en sort, tu es comme hypnotisée. Tu ouvres la bouteille de juste d’orange et boit une gorgée, tu en met partout, ça déborde, ça t’énerve. Tu as tout salie, tu sens une colère incontrôlable montée en toi. Tu ne peux pas lutter contre ça. D’un geste violent tu refermes la porte du frigo. Ton cerveau a sans doute été gelé par le froid du réfrégirateur puisque sans que tu puisses imposer aucune résistance ton bras se lève et jette la bouteille en verre contre le mur. Dans un fracas bruyant, elle s’éclate contre le mur. Tu t’en veux, tu ne sais pas pourquoi tu as fait. Tu t’assoie contre le mur d’en face. Reste quelques secondes les yeux fixés sur le liquide dégoulinant sur le mur puis tu éclates en sanglots.
Bébé commence à faire ses dents. Elle te réveille au beau milieu de la nuit. T'es exténué. Tu ne dors pas beaucoup. Ton visage est fatigué et tes paupières sont lourdes. Après avoir rendormi Elda vers les deux ou trois heures du matin, tu t'étais recouché. T'avais replongé dans les bras de morphée si facilement. Elda avait mis du temps à se rendormir, quant à elle. Ça t'étonnes qu'elle n'est pas réveillée Maggie, la fille que tu hébergeais de temps à autre. Tu sais pas trop pourquoi elle est là. T'avais fait preuve de bonté un jour en l'invitant, puis elle revenait de temps en temps. Ça vous faisait de la compagnie à bébé et toi. Même si vous la voyez pas souvent. Petit matin, tu dors toujours profondément jusqu'à entendre un bruit. Tu sursautes dans ton lit. C'était comme un bruit de fracas. Quelque chose de lourd qui explose. Tu sors bien vite de ton lit en marcel et caleçon. Oui, tu cherches pas à t'habiller plus. Instinctivement, tu te précipites dans la chambre d'Elda. Elle va bien. Mais ça la réveillée aussi. Tu la prends dans tes bras pour calmer ses cris. Puis tu repenses à Maggie. Ça doit être elle. Tu descends à la cuisine. Une grande flaque jonche le sol de la pièce. Tu te tournes la tête. Elle est assise dos contre-mur. Tu savais qu'elle avait quelques problèmes mais rien de plus. Tu fais attention où tu mets les pieds. Tu t'approches d'elle. Elda toujours dans tes bras. Maggie, tu vas bien ? Demandes-tu quand même un peu inquiet. Puis un peu la tête dans le cul aussi. Faut l'avouer.
Tu laisses les larmes couler, tu ne luttes pas, de toute façon à quoi bon lutter ? La bataille est vaine. Tu relèves la tête lorsque l’on te demande qu’on te demande si ça va. C’est Ezio, le type qui t’héberge ce soir. Tu les trouves sympa, tu l’aimes bien, tu trouves que c’est un bon père. D’ailleurs il a sa fille dans les bras et lorsque tu le remarques tu éclates à nouveau en sanglots. Tu voulais réveiller personne, ne pas faire de bruit, tu voulais passer inaperçue, mais tu te rends bien compte que c’est impossible. Tu as balancée une bouteille de jus d’orange en verre contre un mur ! Tu finis par articuler un simple « désolé. » tu t’en veux. Tu n’oses même pas regarder Ezio dans les yeux tellement tu as honte. Honte de toi, de ce que tu es, de tes problèmes. Tu finis par regarder à nouveau le jus d’orange qui s’étale par terre. Tu ne sais pas pourquoi mais à chaque fois que tu le regardes, tu sens la colère monter en toi comme la lave dans un volcan. Mais tu détournes aussitôt les yeux pour ne pas que le volcan explose. Tu ne veux pas créer un nouvel incident, tu en as déjà assez fait comme ça. Tu ne veux pas qu’Elda te voit comme ça. Tu l’aimes bien, tu aimes bien t’occuper d’elle. Il faut dire que ça t’aide à vivre aussi, l’argent que te donne généreusement Ezio pour la garde de sa fille. Tu essuies tes larmes avec ta main, tu te dis que tu dois avoir l’air d’une gosse de deux ans.
Tu calmes les cris de ta fille en la serrant doucement contre toi. Tu la berces tendrement. Tu l'embrasses sur le front puis pose les yeux sur Maggie. Tu la vois pleurer aussi. Tu vas pas jouer le papa avec elle non plus. Tu t'assieds à côté d'elle, passant Elda dans le bras opposé. Tu essaies de la réconforter alors qu'elle te dit être désolée. C'est pas grave va. Dis-tu. Tu lui fais comprendre que tu ne lui en veux pas. C'était que du jus de fruit après tout. Puis elle avait le droit d'avoir ses moments de faiblesse. Elle avait peut-être pas fait exprès qui sait. Tu veux m'en parler ? Proposas-tu alors. Tu l'aimais bien cette fille. Elle était gentille, puis elle travaillait bien. C'était une bonne baby-sitter pour bébé. Elda aussi semblait bien l'aimer. C'est ce qui t'importait d'ailleurs le plus. Tu sais que si t'as besoin d'aide ou de quoi que ce soit d'autre, je peux t'aider. Prononces-tu doucement. Bébé arrête de pleurer. Tu te concentres alors sur Maggie, assise à côté de toi. Le sol est froid, ça te gèle les fesses, mais tant pis. Tu passes ton bras derrière sa nuque et tu la rapproches de toi. Tu la serres contre toi pour la rassurer. Pas très évident lorsque tu tiens bébé dans l'autre bras, mais bon.
Tu ne comprenais pas qu’il prenne si bien le fait que tu ais transformé sa cuisine en mini champ de bataille. Il était gentil, tu l’aimais bien pour ça. Beaucoup de monde t’aurais foutu à la porte en criant ou t’aurais jeté un balai dans les mains avec un regard hautain. Mais pas lui, lui il veut comprendre, il veut t’aider. De l’aide, tu en as besoin, c’est vrai, mais tu n’es pas convaincue qu’il pourra arranger tes problèmes. « je sais pas… » réponds-tu lorsqu’il te demande si tu veux en parler. Tu apportes là une réponse très constructive qui te fait passer pour une vraie gamine. A cet instant tu es plus que fragile, tu as besoin d’être protégée. Ezio ajoute ensuite que si tu as besoin de quoi que ce soit, il est là. Tu esquisses un sourire car tu es tout de même heureuse que quelqu’un pense à toi. Il te prend ensuite dans ses bras, tout en tenant Elda. « merci. » dis-tu simplement. Tu le remercies de bien vouloir t’héberger, d’être gentil, de vouloir comprendre, de t’aider, de te prendre dans ses bras. « je crois que c’est à cause du cirque. » ajoutes-tu comme pour expliquer pourquoi tu t’es emportée. Tu es persuadée que ça a un rapport avec ça. Tu as du mal à t’en défaire, mais tu veux te venger de ce qu’on t’a fait. Il avait des gens gentils, que tu aimais bien dans la troupe, mais il y en a d’autres qui rien que d’y penser te filent la chair de poule et te donne à nouveau envie de pleurer.
pardon c'est court je dois éteindre l'ordi je ferais mieux au prochain
nightmare ft. maggie
Elle te remercie. C'est tout naturel. C'est vrai que ça te paraissait tout à fait normal, c'était légitime d'aider une jeune fille dans le besoin. Elle était désespérée cette fille. Elle souffrait de quelque chose. Quelque chose lui faisait du mal. Quelqu'un peut-être même. Tu aurais pu t'inventer tous les scénarios possibles dans ta tête. Mais tu n'avais pas connaissance de ce qui la tracassait jour et nuit. Elle parle de cirque. Tu savais vaguement qu'elle en avait fait partie. Rien de plus. Dis-moi tout. Prononças-tu. Tu voulais en découvrir davantage sur ce petit bout de femme que t'hébergeais de temps à autre chez toi et à qui tu confiais bébé. Ça te fera du bien d'en parler. Oui ou non. Toi, tu ne voulais pas parler de tes malheurs. Alors, tu pouvais très bien comprendre qu'elle ne le veuille pas non plus. Tu passes ta main dans ses cheveux. Tu ne voulais pas la forcer, tu lui laissais le choix de te parler ou non.
Il voyait que tu avais un besoin de te confesser à quelqu’un, de t’exprimer, de dire ce que tu ressentais, ce qui n’allait pas. Sans t’en rendre compte tu poses ta main sur son genou au lieu du tiens et tu commences à le caresser avec ton pouce. Tu as le regard dans le vide et tu ne te rends même pas compte que ce n’est pas ton genou. Heureusement sinon tu deviendrais rose comme une pivoine et tu baisserais la tête, honteuse d’avoir eu ce geste déplacé et d’être dans cette tenue. C’est vrai que tout comme lui tu ne portes pas grand chose, juste une petite culotte et un grand t-shirt qui t’arrives au niveau du milieu des cuisses et qui te sert de chemise de nuit. Rien d’indécent ou de provocateur, mais si tu te rendais compte de ce que tu portais tu serais mal à l’aise. Bref. Le regard vague tu commences à parler « je suis née dans un cirque, mais un jour je suis partie pour faire une formation de gymnaste, je suis revenue six ans plus tard, mais les choses et les gens avaient changés. J’avais grandi, c’était plus comme avant. Et puis il y avait un garçon, un nouveau, il me faisait peur. Et un soir…quand j’étais dans ma caravane en train de me changer il est entré et…il a fermé la porte à clef et… » tu éclates à nouveau en sanglots. « il a voulu me déshabiller mais j’ai réussi à partir avant. » tu regrettais qu’Elda entende ça, tu espérais qu’elle ne comprenne pas, de toute façon elle ne peut pas comprendre.
Tu l'observes tendrement. Elle a le regard dans le vide. Elle ne tourne pas la tête lorsque tu lui parles. Elle te paraît désorientée. Presque même dans un état second. Tu vois sa main se poser sur ta jambe. Tu ne dis rien. Elle caresse maintenant ton genou. Elle te raconte quelques trucs. Sur son passé. Elle te parle du cirque. D'un garçon qui aurait tenté de lui faire du mal. Tu te sens mal pour elle. Tu l'écoutes attentivement et tu la sers un peu plus contre toi. Comme pour lui faire comprendre que t'es là pour la rassurer. Elle pleure de plus belle dans tes bras. Tu ne sais pas quoi lui dire pour lui remonter le moral. Tu cherches la bonne formulation. Mais bébé se remet à pleurer. Ses pleurs t'épuisent réellement. Tu la berces un instant puis tu retournes la tête vers Maggie. N'y penses plus d'accord. Tu as été plus forte que ce type Maggie. T'es plus forte que ça, il faut que tu tournes la page. Même si ça fait mal. C'était peut-être pas le meilleur conseil que tu pouvais lui donner, mais tu le pensais vraiment. Tu croyais en elle. C'était une fille bien. Ça te fait quand même de la peine d'apprendre ce qui lui était arrivé. C'est pas grave d'accord. Il te fera plus de mal. Tu ferais presque le serment de la protéger comme tu protèges ta fille de l'extérieur. Tu ne voulais pas la voir dans cet état. Elle était toute jeune encore. C'était une fille adorable. C'est ce que tu pensais du moins.
Il te dit qu’il faut que tu tournes la page, que ce ne sera pas facile, mais il le faut. Tu as déjà essayé de te dire que c’est du passé que ça n’arrivera plus, mais à chaque fois qu’un homme passe à côté de toi tu as peur. Tu ne supportes plus qu’on te regarde ou qu’on veuille bien t’aimer ou t’embrasser. Tu n’arrives plus à faire confiance. Au niveau de l’amour, tu as toujours eu des problèmes, comme tu as vécu dans un cirque tu n’as pas connu beaucoup d’histoires. Une quand tu avais douze ans pendant ta formation de gymnaste. Tu l’as embrassé une fois avant qu’il ne parte et c’est tout. Et une autre fois à ton retour au cirque, mais ça n’a pas duré très longtemps. Il n’arrivait pas à se faire à l’idée que tu ne veuilles pas coucher avec lui. Tu as eu peur cette fois là aussi, mais il y avait ton protecteur, ton ange-gardien pour veiller sur toi et faire attention que ce type ne s’approche plus de toi. Mais celui qui a voulu t’agresser, tu n’en a parlé à personne, jusqu’à maintenant…Tu ne veux pas qu’Elda pleure, même si c’est déjà le cas, tu veux qu’elle soit apaisée. Alors une fois de plus tu sèches tes larmes. Et tu te rends compte que tu avais ta main sur son genou. Tu es terriblement gênée tu ne sais plus ou te mettre. C’est vrai que des fois tu fais les choses sans t’en rendre compte. Tu as honte et tu ne sais pas quoi dire à part l’éternel « désolé. » qui sort trop souvent de ta bouche.
Elle s'excuse à nouveau. Tu lui chuchotes quelques mots doux à l'oreille. Des petits mots comme 'c'est pas grave' ou 'je t'en veux pas'. Des trucs rassurants. Tu veux pas qu'elle soit gênée parce qu'elle a posé sa main sur ta jambe ou parce qu'elle a explosé ta bouteille de jus de fruit contre le mur de la cuisine. Elle avait le droit d'avoir ses moments de crise. Tu connaissais aussi des moments de faiblesses depuis la disparition d'Abigail. Des fois, ça t'arrivait d'être mal. Tu crisais en changeant la couche de bébé. Toi aussi, t'étais à bout parfois. Alors, ça te paraissait naturel d'aider Maggie. Elle avait besoin de ton aide. Elle avait rien à quoi ce raccrocher. Ça te faisait quand même plaisir d'avoir une femme à la maison. Ça te permettait de décompresser un peu. Elle s'occupait de bébé pendant que tu te reposais. Ou quand tu sortais pour des rendez-vous. Une bonne baby-sitter en soit. Tu délies votre étreinte et tu te relèves doucement en tenant fermement bébé de tes deux bras. Tu vas la déposer dans son landau. Tu le ramènes à la cuisine et tu le poses sur la table. En plein milieu, elle bougera pas. Tu reviens vers Maggie et tu l'aides à se relever. Tu la prends dans tes bras. Je vais nettoyer. Dis-tu. T'es quand même un gentil gars. Tu peux t'occuper d'Elda pendant ce temps ? Lui demandes-tu. Tu ne voulais pas laisser Maggie toute seule. Ce serait bête qu'elle re-pique une crise. Puis t'étais juste à côté. À moins que tu préfères te reposer un peu.
Il se sépare de toi et se relève. Il t’a dit qu’il ne t’en voulait pas pour ton geste, que ce n’est pas grave. C’est vrai qu’après tout il n’y a rien de grave là-dedans mais tu es de genre à tout amplifier et catastropher. Il retourne dans la chambre et revient avec Elda dans un landau, ça te fait sourire, tu ne sais pas pourquoi. Tu as toujours eu beaucoup d’affection pour les enfants, tu aimerais bien en avoir un jour. Tu as pensé à en adopter, mais vu ta condition, tu ne préfères pas. Tu n’arrives même pas à subvenir à tes propres besoins, tu n’as pas de toit. Alors pas la peine de penser à un enfant. Et puis tu es encore bien trop jeune. Alors tu t’occupes des enfants des autres, tu aimes ça et ça te fait un peu d’argent. Et puis ça te permet aussi de rencontrer des gens sympas, comme Ezio. Il t’aide ensuite à te relever et te prend dans ses bras, tu souries. Il te dit qu’il va nettoyer, tu aimerais lui répondre que tu peux le faire mais il te propose de t’occuper de sa fille et ça tu ne peux pas refuser. Il te propose également d’aller te reposer, mais tu ne peux pas, pas maintenant. « je vais m’occuper d’elle, je crois pas que j’arriverais à dormir. » tu la sors du landau et la prends dans tes bras, tu souries et commences à la bercer. Puis tu relèves ton regard vers Ezio « je peux te poser une question…indiscrète ? »
Elle préfère s'occuper de ta fille que d'aller se reposer. T'acceptes sa réponse d'un signe léger de la tête, puis tu vas chercher le balais et un torchon. Lorsque tu réapparais dans la cuisine, Maggie tiens bébé dans ses bras. Tu la regardes un petit instant puis tu te baisses pour ramasser les morceaux de verre. Tu fais bien gaffe à pas te couper un doigt en les ramassant. Tu ramasses le plus gros puis t'éponges le jus de fruit. C'est pas gagner, y en a partout. Sur le mur, sur le sol. Un vrai désastre. Maggie te parle. Elle veut te poser une question. Indiscrète. Ça sonne mal dans sa voix. T'acquiesces quand même, concentré dans ta tâche.
Il commence à ramasser les bouts de verre et à nettoyer lorsque tu lui demandes si tu peux poser une question. Il esquisse mais tu hésites malgré tout à lui dire ce que tu as en tête. Tu as peur qu'il le prenne mal et qu'il s'énerve. Tu as également peur qu'il devienne triste. Tu te demandes si c'est une bonne idée, mais tu veux savoir, alors tu te lances "c'est qui la mère d'Elda ?" voilà, c'est dit. Un poids en moins. Tu as toujours voulu poser cette question mais tu n'as jamais trouvé le moment adéquat pour ça. Tu as peur de sa réponse, tu ne sais pas comment il va le prendre.
Tu t'attendais à cette question. Tu t'attendais à ce qu'un jour où l'autre on te demande qui est la mère de ta fille. C'est franchement pas le sujet qui te ravit le plus d'aborder. Avec qui que ce soit. Si t'avais fuit l'Italie, c'était pour recommencer à zéro. Et l'oublier aussi. Même si c'était quasiment impossible. Tu t'arrêtes un moment et tu relèves les yeux vers Maggie et Elda. Ça t'attriste. Parce que t'imagines Abigail à la place de Maggie. T'aimerais switcher les rôles. Tu sais pas trop quoi lui répondre. Tu cherches un moyen mais ça te blesse rien que d'y penser. Elle est plus des nôtres. Elle est partie loin. Trop loin même. Les mots sortent difficilement. Ta gorge se noue. Pas la peine de t'énerver. Elle avait le droit de poser la question après tout. Elle gardait bébé régulièrement et n'avais vu aucune femme en ta compagnie. Fallait bien se douter que ça susciterait un certain intérêt.
Tu as peur de sa réponse, pas forcément de sa réaction, mais de sa réponse. Enfin tu as peur de tout, tu es une vraie peureuse. Tu as peur de la vie, tu as peur des gens, tu devrais peut-être vivre dans une caverne au final. Mais même là tu aurais peur, parce qu'il fait noir. Tu es prano' et apeurée, tu es comme un petit chaton abandonné. Il se relève la tête vers toi et elda et tu restes figée, scotchée. Tes pieds s'engourdissent et lorsqu'il réponds à ta question, tu sens ta gorge se nouer. Elle est morte. Pourquoi est-ce que tu as posé cette foutue question ? Trop curieuse parfois, il faudrait que tu apprennes à parler moins, même si tu ne parles déjà pas beaucoup. Tu sens les larmes montées parce que tu es émue et triste pour lui, tu tentes de les réfréner comme tu peux. "je...je suis désolé" une fois de plus tu t'excuses, mais cette fois tu as vraiment l'impression d'avoir déconné, d'avoir demandé quelque chose qu'il ne fallait pas. "si tu veux en parler..." dis-tu en esquissant un sourire bienveillant. Lui voulait te protéger et t'aider, tu veux en faire de même. Tu veux lui rende service. S'il ne veut pas, c'est son choix.
Tu rebaisses la tête après lui avoir dit. Tu veux te retenir de pleurer. Tu veux pas qu'Elda te voye comme ça. Tu voulais rester fort devant elle. Devant tout le monde même. Tu voulais être le bon papa pour ta fille. Tu voulais la protéger. Alors, tu préférais te mentir à toi-même en te disant que ça allait bien. Mais c'était faux. T'entends Maggie dire qu'elle est désolée. Ça te peine encore plus. T'éponges le jus de fruit sur le sol pour te changer ne serait-ce qu'une seconde les idées, mais elle revient dessus. Elle te fait comprendre qu'elle est là si tu as besoin d'en parler. Le problème, c'est que ça te faisait trop de mal de penser à elle. Alors, tu ne dis rien sur l'instant et tu laisses Maggie avec bébé. Tu finis de ramasser ce qu'il y a par-terre. Tu mets tout à la poubelle. Quand t'as fini, tu vas t'asseoir. Elle est morte en lui donnant la vie. Tu respires doucement pour retenir tes larmes. Tu ne sais même pas comment tout lui expliquer. Ce serait tellement long de tout lui dire. Elle poserait des questions et t'y répondrais.
Il ne dit rien et toi non plus. Tu ne veux pas enfoncer le clou, tu vois bien qu'il est assez mal comme ça, tu ne veux pas aggraver les choses. Tu vois que c'est douloureux pour lui d'en parler, tout comme toi de parler de ton histoire. Sauf que lui n'a pas fait une crise à cause d'une bouteille de jus d'orange, par contre il doit ramasser les morceaux. Une fois qu'il a finit, il va s'assoir et finit par te dire que sa femme est morte en donnant la vie à Elda. A force de la bercer, la petite s'est calmée et commence à se rendormir, tu la reposes avec délicatesse dans le landau et retournes vers Ezio. Ça te fait de la peine de le voir triste. Tu t’assois alors à côté de lui et tu le prends dans tes bras, comme lui l'a fait tout à l'heure. C'est à ton tour d'être gentille et de l'aider. "un seul être vous manque, et tout est dépeuplé, disait De Lamartine, je veux bien t'aider à replanter la forêt." ça t'es venue comme ça.
Tu regardes Maggie déposer ta fille dans son landau. Elle recommence à dormir. Tu jettes un oeil à ta fille. Tu la trouves mignonne quand elle dort. Magnifique même. Elle a le don de te faire sourire cette petite. Et sa présence te fait un bien fou malgré tout. Maggie revient vers toi. Elle te prend dans ses bras. Tu l'entends dire un truc, mais tu fais pas trop attention. Ça parle de forêt. Tu comprends pas tout. Tu cherches pas à comprendre non plus. Tu te laisses aller dans ses bras. Oui, tu pleures. Abigail te manque. Même si votre relation était particulière, tu l'aimais et puis c'était la mère de ta fille. Tu voulais même pas imaginer la situation d'ici quelques années. Le jour où Elda te poserait la question fatidique de savoir où est sa mère. Elle n'avait que toi auprès d'elle. Et ça te blessait profondément qu'on te pose la question. T'es dans les bras de la jeune fille. Tu ne dis rien de plus et tu pleures juste. Tes yeux sont tout humides. Tu veux pas que ta fille se réveille, alors t'essayes de retenir les petits bruits qui pourraient s'échapper de ta gorge.
Tu vois qu’il pleure et tu retiens tes larmes. Tu dois avoir l’air forte pour pouvoir l’aider. Lui n’a pas pleuré quand tu lui as raconté ton histoire, il a été compréhensif et il t’a aidé, tu dois en faire de même. Tu lui caresses doucement les cheveux, comme pour l’apaiser. Ça te fait quand même bizarre de prendre un homme dans tes bras. Tu sais qu’il ne te fera aucun mal, tu as confiance en lui. Mais tout de même, cette situation te gêne quand même un peu. Tu desserres ton étreinte et tu le regardes dans les yeux. « tu l’aimais ?…tu l’aimes encore ? » tu veux savoir, tu poses trop de questions, tu es trop curieuse. Mais tu veux l’aider à s’en sortir. Alors pourquoi pas l’aider à rencontrer quelqu’un pour oublier sa femme ? Enfin non, tu ne veux pas qu’il l’oublie, tu veux que ce soit du passé et que maintenant il pense au présent et à l’avenir.
Si tu l'aimais. Si tu l'aimes toujours. C'est ce que Maggie vient de te demander. Bien sûre que tu l'aimais toujours. Tu pourrais sans doute pas tourner la page aussi facilement. Elda te la rappelait constamment. Son départ t'avait profondément marqué. Et même si Abigail n'était plus là, tu n'arrivais pas à approcher d'autres femmes. Ça te semblait impossible. Inimaginable pour toi d'être intime à nouveau avec une femme. Tu te préférais encore avec un homme. Parce que ça te laissait une certaine liberté. Ils ne t'emmerdaient pas avec les sentiments. Puis, tu savais très bien que tu ferais pas ta vie avec. Ta sexualité était lourde de secret dont Maggie n'avait même pas idée. Elle me manque oui. J'aimerais qu'elle revienne. Elda n'a plus de mère. Et moi.. Tu souffles un coup pour évacuer l'air qui te bouffe les poumons. ..je suis tout seul pour l'élever. Tu soupires. Tu ravales ta salive. Difficilement. C'est dur Maggie. Prononces-tu. Tu regardes Maggie. Elle est adorable avec toi. Elle te serre contre elle. Sa présence te fait du bien.
Il te dit qu’elle lui manque et qu’il aimerait qu’elle revienne, mais ce n’est pas comme-ci elle était partie…elle n’est plus là, elle ne peut pas revenir, tu le sais. Il te dit que c’est difficile et tu veux bien le comprendre. Tu trouves ça normal que sa blessure ne soit pas encore cicatrisé, Elda est encore tout petite, sa femme n’est donc pas morte il y a longtemps. Ça te fait bizarre de faire cette constatation. Enfin bref. « je sais pas quoi te dire…j’ai jamais connu ça…être avec quelqu’un » réponds-tu en baissant la tête. Tu aurais aimé lui dire que tu comprends un peu sa peine car toi aussi tu as connu des coups durs de ce genre en amour, mais ce n’est pas vrai. Non pas que tu sois sans sentiments, mais tu n’as pas eu l’occasion d’en avoir. Tu as bien croisé le regard d’un ou deux garçons une fois et tu as senti comme des papillons dans ton ventre, mais rien de plus ; et ce n’est pas maintenant que tu es complètement traumatisée par le contacte physique que tu vas te trouver quelqu’un.
Elle ne sait pas quoi te dire. C'est ce qu'elle te réponds. Elle n'a pas connu ça elle. Elle t'avoue ne jamais avoir connu de relation avec un homme. Tu comprends qu'elle a jamais été en couple. Tu te doutes que depuis l'incident au cirque, elle doit être terrorisée. En même temps, vu l'état de ta cuisine, t'en étais même sûr. Tu ne lui conseilles pas de tomber amoureuse. L'amour, ça fait mal. Ça peut être vache et ça te fais souffrir inutilement. Mais ça peut apporter de bonnes choses. Comme Elda. Même si au début, vous n'étiez pas sûrs de la garder, vous l'aviez finalement fait. Parce que vous vous étiez fait à l'idée de créer votre petite famille. Parce qu'au fil des mois, vous commenciez à l'aimer. Jamais ? Demandes-tu doucement en relevant la tête. Tu essayes d'intercepter son regard. Ça t'étonnes tout de même qu'elle n'ait pas les hommes à ses pieds. Elle est jolie. Oui, tu la trouves jolie. Puis son innocence et sa bonté la rend exceptionnelle. C'est peut-être indiscret ce que tu lui demandes, mais puisque tu lui ouvrais pleinement ton coeur, autant essayer de voir ce que le sien renfermait.
Il ne semble pas vraiment te croire lorsque tu lui dis que tu n’as jamais connu d’histoire d’amour. Pourtant c’est bel et bien la vérité. Tu regardes à nouveau dans le vide devant toi. Tu redresses tes genoux et poses ta tête dessus. Tu t’arranges également pour ne pas qu’on voit ta culotte en mettant comme tu peux ta chemise de nuit. Heureusement que c’est un grand t-shirt ! Tu réfléchis à ce que tu pourrais lui dire et comment lui expliquer que dans ta vie tu n’as jamais été en couple et que tu n’as embrassé qu’un ou deux garçons. Tu as vingt ans après tout, tu te dis que tu as encore toute ta vie pour tomber amoureuse. Si on t’a enlevé ton enfance on ne peut plus te retirer le reste. « avant, ma vie c’était le cirque et la gym. Je ne pouvais pas penser aux garçons, j’avais pas le temps. » et maintenant tu pourrais peut-être commencer à chercher l’homme de ta vie. Mais ta principale préoccupation est de gagner un peu d’argent pour vivre et tu es traumatisée par les hommes !
Elle ne pouvait pas penser aux garçons de par son passé. Ça te fit de la peine d'apprendre qu'elle n'avait pas connu ça. Jamais. Elle était plus jeune que toi, mais elle était jolie aussi. Tu te demandais bien comment c'était possible pour elle d'être seule. Puis, on ne peut pas dire d'elle qu'elle est insupportable. C'est dommage. T'aurais pas aimé qu'on te prive de tes libertés toi. T'aimais pas ça qu'on t'oblige à faire quoi que ce soit. J'espère que tu te trouveras un type bien. Tu le mérites. Dis-tu en relevant la tête vers elle. Tu l'aimais bien cette fille. Elle t'était d'une précieuse aide avec Elda. Tu voulais qu'elle connaisse à son tour l'amour. Même si ça peut faire mal. T'espères juste, au fond, qu'elle tombera pas sur un type comme celui du cirque. Celui qu'avait tenté de lui faire du mal. Maggie, elle était un peu comme une fleur prête à éclore, qu'on veut désespérément protéger du froid et des vacheries.
Il te dit que c’est dommage, que tu n’es pas connu l’amour. Il est gentil, il a raison, ça te fait sourire. Tu te dis que faut que t’arrêtes d’avoir que tous les hommes ne sont pas des monstres, qu’il y en a des gentils, qui te veulent aucun mal, comme Ezio par exemple. Il enchaîne ensuite en disant qu’il espère que tu trouves quelqu’un de bien car tu le mérites. « merci. » dis-tu en souriant. Tu croises son regard et tu sens tes joues devenir rouges. C’est une autre chose que tu dois changer. Tu dois arrêter d’être aussi gênée lorsque tu discutes avec quelqu’un et surtout un homme. Tu es timide, tu as du mal à parler et tu n’oses pas aller vers les gens. Tu sais que tu ne seras jamais hyper sociable mais tu pourrais au moins résoudre un minimum ce petite problème d’agoraphobie et de timidité. Tu te tortilles un peu dans tous les sens, tu ne sais pas trop quoi faire ni dire, tu as les mains moites. Pour ne pas avoir l’air stupide plus longtemps tu te lèves et dit « je vais me re-coucher. » tu sais que tu n’arriveras pas à te rendormir, mais tu préfères rester dans ton lit les yeux ouverts à fixer le plafond plutôt que d’avoir l’air cruche plus longtemps.