la fraîcheur de la soirée qui commençait à tomber se faufilait entre les fenêtres, me faisant légèrement frissonner. j'attrapais un vieux gilet dans mon armoire, et mon frère se dépêcha de me l'enlever des épaules. je le regardais, interloquée. « on sort, ce soir. des anciens potes du lycée m'attendent en bas, et tu viens avec nous, ça te fera du bien! » je fronçais les yeux et marmonna. « Hmmm. » de toute façon, je n'avais pas tellement le choix. j'appréciais le fait que Sam fasse tout pour que j'aille mieux, même si, au fond, nous savions bien tous les deux que c'était impossible. que la blessure resterait intacte. mais il fallait vivre malgré tout. j'enfilai alors quelque chose de mieux, et le suivi hors de l'appartement. je ne sais pas où est-ce qu'il m'embarquait, et c'est ça que j'aimais avec lui. en bas, je reconnaissais quelques têtes, mais surtout une, qui m'était plus familière que les autres. je lui lançai un petit sourire : « Dionysos ! »

Ce fut un simple coup de fil qui me fit sortir de mon canapé ce soir là. Un appel de Sam, m'invitant plus ou moins à une soirée entre potes du lycée. Je ne parle plus à tous ces gens quasiment, sauf lui et encore, je le vois beaucoup moins qu'avant. Et je sais que si il m'invite, c'est pour me sortir de ma dépression alors je fais un effort, et me lève. En me regardant dans le miroir, je décide de prendre une douche et de me changer avant, laissant sur le sol de la salle de bain mon jogging et mon t-shirt pour laisser place à un jean et une chemise. Rendez vous chez lui. Une fois sur place, j'ai serré la main des gens déjà arrivés, et je me suis senti... hors de ma place. Tous me regardaient comme un enfant que l'on ne devait pas froisser à la moindre parole, et avec une petite lueur de pitié. Qu'est-ce que je fichais là ? Heureusement, Sam sorti de chez lui, suivi de sa petite soeur. Je serre la main de Sam, et me dirige vers Emilia. Hey ! Je ne peux que lui rendre son sourire avant de m'approcher et de la serrer contre moi. Elle m'a manqué, depuis le temps. Tu viens avec nous ? Je n'ose pas lui demander si elle va bien car au fond, je connais la réponse.

dionysos me sourit à son tour, et me prit dans ses bras. ça me rassure de voir quelqu'un que je connais. j'aurais pas tellement aimé passé la soirée avec ces inconnus, même si ce sont des potes de Sam. je ne savais pas exactement où on allait, mais il était là, alors ça n'allait pas être aussi désagréable que ça. "Oui, je viens, tu connais Sam, j'ai pas eu trop le choix..." je rigolais doucement, et une fois toute la bande arrivée, nous commencions à marcher vers je ne sais où. tant pis, je suivais le mouvement. cela faisait longtemps que je n'avais pas vu dionysos, il fallait rattraper le temps perdu. "alors, euh... ça fait longtemps, dis-moi. tu deviens quoi, toi?" je déteste cette question, bordel.

Ca faisait du bien d'avoir Emilia avec moi, comme si je n'étais plus seul. Depuis que j'étais dans mon état de dépression, tout le monde me prenait pour un alien et ça devait être la même chose pour elle donc... autant être des aliens ensemble ! Oh oui, je connaissais Sam, et c'était bien pour ça que je n'avais même pas essayé de lui dire que je ne voulais pas venir. Mais en tout cas, j'étais assez content de la voir ici, réellement. On a donc commencé à avancer, et elle m'a posé la question qui tue : Qu'est-ce que je devenais. J'ai souri un peu, baissant la tête. Pas grand chose. Rien n'à changé depuis ces derniers mois. J'étais toujours le mec déprimé pour un événement qui s'est passé il y a plus de deux ans maintenant. Et toi ?

il baissa la tête. et je me sentais bête d'avoir posé cette question. parce que j'avais vaguement entendu dire par Sam, dans une conversation volée, qu'il avait eu un "coup de déprime" il y a quelques temps. il me répondit quand même, et même s'il me dit le contraire, je savais très bien qu'au fond, ça n'allait pas. quand on est pas bien comme moi, on arrive à sentir le malheur des autres. « Moi... Oh. Tu sais, la routine. J'essaye d'aller mieux, y'a des jours avec, des jours sans. Puis... ça fait plus de huit ans, maintenant, il faut bien que je passe à autre chose. » je baissai les yeux en essayant de garder le sourire. bizarrement, j'avais envie de me confesser, ce soir. à part à Sam, je ne parlais de cela à personne d'autre. mais Dionysos avait une présence réconfortante, et je savais qu'il ne me jugerait pas. « Désolée de te parler de ça, là, comme ça... c'est pas mon intention de plomber la soirée. »

Je n'étais pas très heureux de lui poser cette question... Après tout, c'était quand même super indiscret, et je savais qu'elle n'allait pas me dire que tout était rentré dans l'ordre. Nous faisions parti de ceux qui étaient brisés de l’intérieur, et il fallait plus que du temps pour nous reconstruire. Je lui souris, comme pour montrer qu'elle peut surmonter tout ça, et je lui prends le bras, pour qu'elle marche à mes côtés. Ne t'excuse pas. Au contraire, si ça peut te faire du bien, lâche toi. Tu peux même me frapper si tu veux ! Je savais que parfois, ça pouvait faire un bien fou, pour avoir souvent frapper pour casser ma colère. Mais pour la soirée, on va essayer de s'amuser... un petit break. Et puis, ça fera plaisir à ton frère en plus. ça n'allait pas être facile, mais j'étais prêt à faire des efforts.

il me prit le bras, et nous marchions côte à côte, nos pas rythmés par nos pieds qui se levaient et se reposaient sur le sol dans un seul et même mouvement. Tu peux même me frapper si tu veux ! je rigolais à ces mots, tout en faisant semblant de lui frapper l'épaule. « Oui, ça ne peut que nous faire du bien. Et puis... c'est pas souvent que je parle avec quelqu'un qui me comprend vraiment. » même si j'avais une bande d'amis toujours là pour moi, même s'ils faisaient tout pour me réconforter, ils ne savaient pas, eux. ils ne savaient pas ce que ça faisait d'être blessé au plus profond de son âme. lui, il savait. « Oh, tu sais où on va là, d'ailleurs ? »

Elle frappe mon épaule, et je souris légèrement. Bien sûr, elle a fait ça pour rire, tellement que je n'ai pas senti grand chose. est-ce que l'on peut appeler ça frapper  du coup ? Bref, en tout cas, elle semble d'accord pour que nous fassions un effort d’intégration ce soir parmi eux. Nous aurions eu du mal seul, mais à deux ça devrait être plus facile. Et puis je soulignais l'effort de son frère. Par contre, je n'avais pas la réponse à sa question. Pas vraiment... je sais qu'on va dans une espèce de bar boite resto mais sinon... ton frère a pas voulu cracher totalement le morceau, mais il m'a dit que c'était génial... Je grimace un peu, raffermissant ma prise sur le bras d'Emilia. J'espère qu'on y restera pas des heures..

mon frère n'avait ainsi pas précisé non plus à ses amis, du moins à Dionysos, où est-ce que la soirée se passerait. comme d'habitude, c'est du Sam tout craché, ça. qu'importe. j'avais juste pas envie de me retrouver seule entourée d'une masse de gens inconnus. Une espèce de bar boite resto, m'avait répondu mon ami. nous arrivions en effet dans le centre ville, nous pouvions entendre la musique se rapprocher au fur et à mesure que nous avancions. toute la petite bande se dirigea vers un bar, bondé, noir de monde. il y avait l'air d'y avoir de l'ambiance. je regardais Dionysos piteusement « oh, ce monde, mon dieu... »

Lorsque j'ai senti le bras d'Emilia se resserrer un peu sur le mien, comme je l'avais fait précédemment, j'ai su qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas. Elle me précisa qu'il y avait du monde, et il me suffisait de relever la tête pour voir que effectivement, nous allions avoir du mal à nous en sortir. J'ai essayé de capter le regard de Sam, histoire de lui montrer que nous n'étions pas prêt mais, après un signe de main, il nous força presque à avancer. Heureusement, il avait apparemment une table où nous ses amis et nous étions maintenant assis. Bon, c'était déjà ça. Plusieurs d'entre eux étaient déjà partis sur la piste, alors qu'un autre était au bar, commandant plusieurs bouteilles. Moi, je me suis tourné vers Emilia. ça va aller ?

une fois assis, Dionysos me demanda si ça allait aller. j'appréciais le fait qu'il se soucie de moi. "oh, oui, oui. ça va certainement me faire du bien, Sam a raison." je lui lançais un sourire mesquin, je pense que je disais cela seulement pour me rassurer. et pour essayer de faire un effort, aussi. pour Sam. et pour Diony, que je n'avais pas vu depuis longtemps. ça faisait quelques mois déjà que je n'avais pas mis les pieds dans un bar. je regardais autour de moi. je ne me sentais pas si mal que ça, finalement. je regardais mon ami avec un air de défi, "tu sais quoi? je crois que j'ai envie de m'amuser ce soir. réellement."

Je ne croyais pas vraiment au sourire rassurant d'Emilia, mais je voulais y croire. Et puis, j'espérais sincèrement qu'elle se sente bien, et qu'elle passe une bonne soirée. Et j'allais l'aider à ça, ça m'occuperait assez l'esprit pour ne pas déprimer pendant des heures. Mais il se passa quelque chose auquel je ne m'attendais pas du tout : Elle voulait réellement s'amuser. En tout cas, si elle mentait, c'était très bien fait ! Et j'avoue que ça me donnait envie de voir ça. Et qu'est-ce que tu as en tête ? Certainement un peu d'alcool, et de danse. Du coup, je me suis levé, et me suit dirigé vers le bar, lui faisant un signe de tête pour qu'elle me rejoigne, lui désignant le siège à côté du mien. Le premier verre est pour moi !

Dionysos me regarda d'un air interrogé : il ne croyait pas à mon enthousiasme soudain, c'était certain. puis comme s'il avait lu dans mes pensées, il se leva, se dirigea vers le bar en me faisant signe de le suivre, ce que je fis sans hésiter, pour une fois. il paya sa tournée, et je le remerciais "merci, la prochaine, c'est pour moi!" puis nous trinquions, les yeux dans les yeux, sourire aux lèvres. comme si, pendant un instant, nous faisions semblant d'être quelqu'un d'autre. en oubliant notre passé, en vivant le moment présent, en se comportant comme des individus normaux. je finis mon verre d'une traite, et je regardais en direction de notre table, fixant Sam, il ne faisait pas attention à nous pour le moment. je me retournais vers mon ami, il n'avait pas fini de boire. "alleeez, plus vite que ça, il y a d'autres verres qui attendent derrière!"

La prochaine tournée était pour elle, et j'étais qui pour refuser ? Au contraire, ça me faisait plaisir. Entendu ! Je trinque avec elle, la regardant dans les yeux, et porte mon verre à mes lèvres. Mais en tournant la tête, lorsque la miss se met à me parler, je me rends compte qu'elle l'a déjà finie. Très bien ! Et sur ses mots, je vide mon verre, attendant le deuxième, que je vide également, battant Emilia cette fois. Tu penses qu'on peut en boire combien avant de tomber par terre ? Je ris un peu, et remarque un autre duo, qui semble faire comme nous pas très loin. C'était assez étrange, de ce comparer à eux... Je me suis aussi tourné, pour voir la piste de danse, et pouvoir me moquer des gens déchirés qui semblaient croire qu'ils étaient seuls, les montrant à ma voisine.

alors il me regarde d'un air de défi, et vida son deuxième verre sans m'attendre. "ah ouais, tu veux jouer!" et je levais le bras pour faire signe au serveur de nous apporter une autre tournée. Tu penses qu'on peut en boire combien avant de tomber par terre ? je haussais les épaules en rigolant. je n'avais pas de réponse à sa question, et je sentais l'ivresse monter petit à petit dans mes veines, puis dans ma tête, qui commençait à tourner. nous regardons les gens danser sur la piste. "j'ai envie de danser, moi aussi." et je pris mon ami par la main, l'entraînant au milieu du bar, parmi la foule.

Les verres s'enchainent, et je tiens le coup pour l'instant. Pourtant, je ne suis pas vraiment habitué à l'alcool, bien au contraire... Mais je ne sais pas, j'ai envie de me lâcher, et d'oublier un peu. JE suppose qu'Emilia est comme moi, et que c'est pour cela que nous le faisons ensemble. Puis elle me fait part de son envie de danser, et j'avoue avoir hésité. Je ne veux pas danser, je n'aime pas ça. Je n'ai pas dansé depuis des années. Danser, c'est pour les gens heureux... Mais je vais faire un effort, et accepte d'y aller avec elle. Une fois sur la piste, je regarde un peu les gens autour, et essaye de faire pareil, tout en essayant de suivre Emilia dont l'alcool semblait la dérider un peu. Tant mieux, si elle pouvait se sentir bien quelques minutes, ce serait une victoire.

je me sentais bien. comme en transe, c'est la musique qui guide mes pas. mon corps se fait léger, bougeant de gauche à droite, et je ferme les yeux pour mieux sentir les vibrations monter en moi. Dionysos est là, à mes côtés, je lui souris, et le prend dans mes bras avant de retourner au bar. "allez, encore un", et nous trinquons en nous regardant dans les yeux. l'alcool m'avait complètement désinhibée, et me poussait à parler. "dis, tu penses que j'arriverais quand même à faire confiance à un mec, un jour? je veux dire, tu crois que je peux tomber amoureuse?"
et je regrettais déjà ces paroles. un peu.

Je ne suis pas un bon danseur, et lorsque je sens la main d'Emilia se poser sur moi pour nous amener vers le bar, je ne peux pas m'empecher de sourire, bien content de partir de la piste et de l'emprise des nombreux regards que j'ai pu capter. Une fois au bar, nous prenoms un autre verre. Et un de plus, celui qui m'aide surement à arreter de penser ou alors me rend encore plus amer... Tellement que quand elle me pose la question sur le fait de tomber amoureuse, je ne peux que rire legerement, bien que ça soit nerveux. Bien sur. Y'a un pourcentage de connard sur terre, qui font plus ou moins de mal. Tu rencontreras quelqu'un, tu tomberas amoureuse, tu lui feras confiance, et si tu as de la chance, ça sera le bon. Je demande un autre verre au serveur, et le boit d'une traite. Tu y arriveras. Et je veux être le parrain de votre futur enfant. Je lui souris pour détendre l'atmosphère, bien que parler d'amour... Je ne dois pas être crédible, ni prêt.

les paroles de Dionysos, bien qu'incertaines, me rassurent. bien sûr qu'il en existe, des gars bien. bien sûr, que je tomberais amoureuse un jour. mais jusque là, le chemin est long. « euh, on va peut-être attendre un peu pour le gamin ! » je rigolais en pensant à mon enfance, et à toutes ces choses que j'ai loupées. toutes ces choses que je n'aimerais pas infliger à mon propre enfant. je bus une gorgée en jetant un coup d’œil à la tablée de Sam : ils buvaient toujours autant en criant comme des bœufs. je regardais de nouveau mon ami. « au moins, eux, ils n'ont pas de souci pour s'intégrer au reste du monde... »

Spoiler:

Un enfant. c'est le genre de chose que tout le monde rêve d'avoir, normalement. J'en voulais un, avec Jordan, nous en avions même parlé. Maintenant qu'elle est parti, elle a prit ce désir avec elle, mais bizarrement, en parler me fit moins mal que je le pensais. Au contraire, j'étais assez heureux à l'idée qu'Emilia puisse être heureuse, et ça devait arriver, et bien tant mieux pour elle. Je ris avec elle, et regarde Sam et ses amis. Tu sais, ils ont aussi des soucis... Seulement, ils sont moins grave, ou alors ils sont de bons acteurs... Je voulais qu'elle oublie un peu tout ça, et tout à l'heure, la danse avait plutôt bien marché, alors je lui ai offert un autre verre, avant de lui prendre la main. Et je l'ai entraîné sur la piste. Bon, avec les verres, c'était beaucoup plus compliqué pour moi de rester debout, mais au moins, je n'étais plus aussi coincé. Bien au contraire, je commençais tout juste à être à l'aise.