Je rangeais rapidement mes trucs, j'avais fini de bosser et j'étais assez contente. À vrai dire je faisais de moins en moins d'heures au boulot, car j'avais de moins en moins de temps. Mais il m'arrivait parfois d'accepter tout de même de faire quelques après-midi complète, pour prendre une petite pause du surf. Certes, je ne vivais que pour le surf, ou presque juste pour le surf, mais ça faisait du bien parfois, pendant une journée de ne pas toucher à une planche. Mais cela ne voulait pas dire que je n'allais pas passer ma journée à la plage. Alors je ne m'éloignais pas trop, lançant mon sac dans le sable pour aller marcher un peu. Mais alors que je relevais la tête, je vus une chevelure qui me disais vraiment quelque chose. Je m'approche alors un peu. « Leah ? » Si ce n'était pas elle, j'aurais l'air folle, mais au pire, ce n'était pas si grave.

Profitant de la belle température, Leah décide d’aller à la plage. Il n’y a rien qu’elle aime plus que de se faire dorer au soleil en feuilletant un bouquin. D’autant plus que ces dernières semaines ont été ultra mouvementées avec son déménagement en Australie. Une journée à paresser sans faire quoi que ce soit de constructif sera la bienvenue! Allongée sur une chaise de plage, elle entend quelqu’un l’appeler. Elle reconnaît aussitôt la voix, il s’agit de Keely, une de ses bonnes amies avant qu’elle quitte l’Australie, il y a quelques années de ça. Elle se redresse, un sourire aux lèvres, avant de réaliser que si elle est prête à effacer ces dernières années pour repartir sur des meilleures bases, ce n’est peut-être pas le cas de tout le monde. « Keely! » Elle redresse ses lunettes fumées pour bien observer son ancienne amie, ne sachant pas trop quelle attitude adopter.

Je ne m'étais pas mise les pieds dans les plats, il s'agissait bien de Leah que je venais d'apercevoir. J'étais vraiment très contente de la voir, après toutes ses années. À vrai dire, quand je m'étais aperçue qu'elle n'était plus à Gold Coast, je m'étais fait du mauvais sang pour elle, car je n'avais absolument aucune idée d'où elle était partie et encore moins ce qu'elle était devenue. Alors oui, j'étais heureuse de la voir saine et suave et qui m'a l'air assez bien, à vrai dire. « Je suis très heureuse de te voir ! Dit donc, tu t'es fait enlevé par les extraterrestres ou quoi ? » J'étais curieuse oui, mais si elle ne voulait pas m'en parler, je comprendrais. Je déteste qu'on me parle de mon accident, alors si elle n'avait pas envi de parler de son départ, c'était parfait pour moi.

Leah est sincèrement surprise de voir que son amie est heureuse de la voir. Tant mieux, elle en a assez de devoir culpabiliser pour son départ. Elle sait bien qu’elle a fait des erreurs, mais de voir un visage souriant et heureux lui fait beaucoup de bien. « Moi aussi, je suis heureuse de te voir! Vraiment. » Elle se lève de sa chaise et enlace rapidement son amie avant de lui plaquer un bisou sonore sur la joue. « J’étais retournée aux Etats-Unis. Mais je suis de retour, pour de bon cette fois! »

Je la serre quelque peu contre moi avant de reculer, toujours souriante. Je suis tout de même surprise de la voir, puisque oui j'avais bien penser qu'elle ne reviendrait peut-être pas. Mais puisque c'était le cas, alors j'étais ravie. Elle m'avoua alors avoir pris la direction de l'Amérique. Ah, l'Amérique, j'avais toujours rêvé d'y aller et pourtant je n'en avais jamais eu l'occasion. Mais peut-être qu'un jour, j'en aurais la chance. Quoi de mieux qu'espérer. « Et t'es allée dans quel état, hein ? » Je met ma main au-dessus de mes yeux pour me cacher du soleil avant d'ajouter : « Bon retour en tout cas ! Tu vas voir comment l'Australie n'a pas changé d'un poil ! »

Leah pouffe d’un petit rire sans joie. Disons que ces dernières années en Amérique n’avaient rien eu de joyeux pour elle! « Je suis retournée du coin où je viens. C’était… nul. » Elle a détesté chaque jour passé là bas, sauf lorsqu’elle voyait son enfant de temps à autre. « En effet, c’est toujours aussi magnifique! », dit-elle en faisant référence au paysage. Dès la première fois qu’elle avait posé un pied en Australie, elle était tombée amoureuse du pays et son opinion n’avait pas changé. « Je peux t’avouer un truc? Mais… promet moi que ça restera un secret. Peu de gens le savent et je ne tiens pas à ce que ça change. »

Lorsqu'elle me dit qu'elle n'avait pas aimé son retour aux États-Unis, J'hausse un sourcils. Peut-être qu'elle avait déjà fait le tour de tout ce qu'il y avait à faire là-bas. Pourtant j'étais surprise, moi qui croyais qu'il y avait toujours quelque chose à faire. Enfin, je le croyais toujours à vrai dire. Mais je ne pense pas que je pourrais quitté l'Australie aussi longtemps qu'elle. J'y étais née et j'y mourrais sûrement. Et comme elle le disait, c'était magnifique comme endroit. Par contre, elle m'intrigue là, je me demande vraiment ce qu'elle souhaite me dire. « Vas-y donc, je t'écoute ! Et promis, je ne dirai rien à personne ! » Je riais un peu, mais j'étais sincère. Enfin, je la voyais bien me sortir un truc bidon, où ça ne ferrait aucun mal que je le répète.

« J’ai eu un enfant. » En tout cas, si Keely s’attendait à un truc léger et rigolo, elle sera déçue! Leah dit ça d’une voix basse et sérieuse, ne laissant aucun doute sur la véracité de la chose. C’est étrange, parce que son corps ne porte pas vraiment de marque de la maternité : elle a retrouvé sa taille assez rapidement et n’a pas de marques sur la peau. Personne ne pourrait deviner. « Mais il est encore là bas. »

« Oh. » Voilà tout ce que j'avais trouvé à dire. Parce que j'étais un peu sous le choc... Je ne savais pas trop quoi faire puisque je ne savais pas ce qu'elle pensait de cela. Mais une chose était sûre, je savais bien qu'elle n'était pas entrain de me jouer une mauvaise blague. « Et donc, c'est pour ça que tu es partie ? » Enfin, le fait qu'elle ne soit pas avec l'enfant ne me disait rien de bon. Je ne savais pas ce qui s'était passé et j'étais entrain de me dire que peut-être que j'avais bien fait de me faire du soucis pour elle. Puisque peut-être qu'elle n'allait pas très bien... « Avant que je commence à de poser des centaines de questions, dis-moi si ça te dérange. Je sais que parfois dire ce genre de truc c'est soulageant et qu'on a pas trop envi d'en dire des tonnes sur le sujet, donc je préfère demander... » Je prends une grande respiration. « Et puis on peut aller parler ailleurs aussi. Disons que la plage, c'est pas l'endroit le plus discret qui soit. »

Elle hoche la tête lorsque Keely lui demande si c’était la raison de son départ, mais hausse les épaules lorsque son amie lui demande si elle ne veut pas en parler. « Ça ne me dérange pas d’en parler. Ça me soulage, en fait. Disons que je me suis sentie très seule ces derniers temps… » Pour Leah, qui est tellement sociable, les dernières années ont été pas mal difficiles. Elle a espoir que son avenir sera meilleur. « Mais je ne veux pas t’embêter avec ça. Toi, quoi de neuf, depuis tout le temps? » C’est exactement elle ça, vouloir enterrer ses propres problèmes pour ne montrer que le meilleur côté d’elle : celui plus joyeux et exubérant.

Je lui souris un peu, alors qu'elle me dit que ça ne lui dérange pas d'en parler. J'étais curieuse de nature alors je n'aurais pas à me retenir de lui poser toutes les questions qui me passeraient par la tête. Mais je vois bien que ça la rend malheureuse. Je pense que je me sentirais comme elle à vrai dire. Tout comme elle, je n'aimais pas vraiment être seule à long terme. Et je me doutais bien que juste en quittant l'Australie le répertoire d'amis venaient de diminuer. « Tu sais, tu m'embêtes pas du tout. J'suis contente que tu m'en parles et franchement si ça te fait du bien, ne te gène pas. » Je me penche pour ramasser mon sac qui était un peu plus loin. « Enfin moi je m'entraîne toujours pour vivre de surf, donc en gros, pas grand chose. » Je ferme mon sac comme il faut avant d'ajouter : « Allez vient, on va boire un truc. »

Elle hoche la tête, ramassant elle aussi ses trucs et enfilant un short par-dessus son costume de bain. Au fond, ça lui fera beaucoup de bien de se vider le cœur. Alors qu’elle est toute prête, elle entend son téléphone sonner. Le numéro de téléphone qui s’affiche vient des Etats-Unis… Son premier réflexe est de penser à son fils. « Excuse moi, ça ne prendra qu’une minute.. » Normalement elle ne répondrait pas, mais s’il est arrivé quelque chose à Jack, elle veut le savoir. Elle s’éloigne donc un peu, répond au téléphone. La conversation ne dure pas très longtemps, environ deux minutes à la suite desquelles elle revient vers son ami, un air surpris étampé en plein visage. « Euh. Je viens de recevoir un appel d’une chaîne de télé américaine. Ils me veulent dans un reality show. What the hell?! »

Leah pouffe de rire en haussant les épaules. Il est vrai que c'est tentant... Parce qu'elle a toujours rêvé d'être connue! Sa fascination pour les célébrités dure depuis son plus jeune âge, et si elle a choisi d'être journaliste, c'était justement pour se rapprocher de cet univers où elle n'aurait pas eu accent avec ses talents artistiques très moyens. Il est vrai que de participer à une téléréalité pourrait complètement changer sa vie! Mais en même temps, l'idée de faire épier ses moindres faits et gestes par des millions d'Américains la laisse froide. Elle souhaite être connue, oui, mais pas à n'importe quel prix. « C'est trop étrange. Si j'avais reçu cet appel quelques semaines plus tôt, j'aurais dit oui sans hésiter! Mais je n'ai pas vraiment envie de retourner en Amérique, même si ce n'est que pour quelques mois. » C'est surtout qu'elle ne veut pas rompre la promesse qu'elle a fait : celle qu'elle est revenue pour rester, pour de bon! « Bon, on y va boire ce truc? J'ai une folle envie de limonade. Le soleil d'Amérique est trop différent de celui d'Australie, cette chaleur m'a tellement manquée! »