►BLACKOUT

Et puis plus rien. Plus de lumière, plus de chaîne stéréo dont le morceau tourne en boucle, plus de vrombissement de la part de la vieille tour d'ordinateur, le vide total. Il est à peu prêt 23h30 lorsque wall-e se retrouve soudainement dans le noir. Et s'il y a bien une chose dont wall-e n'a pas peur, c'est le noir. Car après tout, ce serait stupide de paniquer à chaque fois qu'on ferme les paupières non ? oui mais voilà, wall-e a besoin de musique pour s'endormir, a besoin du bruit de l'ordinateur pour se faire bercer et surtout, surtout, a besoin de garder ne serais-ce qu'une lumière allumé pour ne pas se sentir seul. Alors bon, wall-e se décide à partir à l'aventure. D'un pas hésitant, il traverse son appartement et observe sa porte d'entrée d'un air douteux. Et si c'était un attentat ? pour venir le chercher, lui, justement ? Il secoue la tête, tente de se vider la tête. les attentats, c'est vers 3h du matin, lorsque tout le monde dort et non pas quand mémère va se coucher. Il ouvre la porte, s'avance, appuis sur la lumière du couloir en vain et déglutis. Doux jésus. il serre son t-shirt contre lui, fronce les sourcils dans l'espoir de voir quelque chose. Puis soudain, ça, un effleurement, une agression même du point de vue de wall-e. Il sursaute brutalement, recule comme une vierge effarouché et se met en position d'attaque, juste au cas où. finalement, c'est peut être un attentat. qui est là ? je...suis presque armé.

Spoiler:

wall-e & absolem-plum Հ bien vu, ray charles.

ca a fait un genre de gros bruit. une espèce de STCHIPUF. enfin le bruit qu'il y a quand il y a une coupure de courant quoi, quand les fusibles pètent. et j'ai pas kiffé. c'est quoi ce bordel ? j'aurais très bien pu être en train de travailler sur mon prochain devoir. ça aurait pu effacer toutes les données de mon pc. bon, en fait je me trémoussais joyeusement sur i'm so excited des pointer sisters, le home cinéma poussé à son maximum. mais ça veut dire que l'affront n'en ai que plus important. j'avais un pied en l'air, les bras agités comme des pieuvres épileptiques et un équilibre précaire debout sur mon canapé. bon. on va déjà commencer par voir ça n'arrive qu'à moi, puis j'aviserais. je m'imagine déjà en train de chanter en acoustique i'm about to lose control and i think i like it. i'm so excited and i just can't hide it and i know, i know, i know, i know, i know i want you, tout en m'agitant dans le noir comme une girafe démembrée à la lueur des bougies. je sors pieds nus sur le palier, c'est le noir total. j'avance de quelques pas et tend le bras pour essayer de trouver l'interrupteur. je frôle quelque chose du bout des doigts et me retient de crier. c'était tout chaud et un courant d'air m'a effleuré le bras. surement pas l'interrupteur en somme. et je l'entends. mon voisin a eu aussi peur que moi visiblement. je l'ai toujours trouvé un peu bizarre, mais je ne le connais pas et il a l'air gentil. « c'est moi, absolem. je suis ta voisine de palier » soudain l'idée que l'isolation phonique de nos appartements ne sont peut-être pas si bonne que ça me vient à l'esprit. peu importe. « chez toi aussi le courant a sauté ? »

La voisine...c'est seulement la voisine. Wall-e se passe une main sur le visage, l'air passablement dépité. Il soupire, sent son compteur revenir à la normal, comme si rien ne s'était passé. Dans le fond, il a un peu honte d'avoir réagi au quart de tour. C'est qu'il a peur de tout, du monde entier et il faudrait qu'il apprenne un jour à réagir avec un peu plus de virilité. Il le sait bien, son père passe sa vie à le lui répéter. ouai, je suis venu voir ce qu'il se passe. bon, une chose est sur, il n'est pas la seule victime de l'immeuble. Peut être bien que c'est tout l'immeuble qui est touché mais que les autres sont déjà trop profondément endormis pour venir réagir. Il fronce les sourcils et tente d’apercevoir la silhouette de sa jeune voisine dans le noir. vous n'avez pas réussi à faire exploser les compteurs à force d'écouteur la musique aussi fort ? sait-on jamais, c'est que lorsqu'elle écoute de la musique, wall-e a parfois l'impression d'être en plein milieu de son salon, à profiter du spectacle comme s'ils vivaient à deux. ceci dit je m'en fou un peu... il veut juste récupérer un semblant d’électricité, qu'il devienne sourd d'ici cinq ans grâce à elle, franchement...ils n'ont pas prévenu d'une coupure d’électricité...si ? je n'ai même pas de bougie" et il marmonne, doucement. évidemment qu'il n'a pas de bougie, pourquoi faire ? la technologie est là. normalement.

Spoiler:

je remue piteusement mes orteils sur le sol glacée du couloir. j'avais jamais remarqué qu'il faisait si froid sur ce palier. en même temps, j'me balade pas pieds nus en pleine nuit dans les couloirs tous les jours non plus, certes. maintenant que mes yeux se sont un peu habitué à l'obscurité, je distingue vaguement la silhouette de wall-e. il est sorti voir ce qu'il se passait lui aussi. il n'y a pas l'air d'avoir grand monde dans les couloirs de l'immeuble hormis nous deux. il n'est pas très tard, mais visiblement tout le monde fait la poule ce soir. au lit à 20h, allez hop hop hop, au dodo. wall-e a une voix relativement douce qui ronronne comme un moteur. j'hausse un sourcil lorsqu'il fait allusion à ma musique bien trop forte. j'esquisse un sourire contrit, bien que je ne suis pas sur qu'il puisse le voir « je ne pense pas que la volume y soit pour quelque chose, normalement c'est le nombre d'appareil qui tourne sur un même secteur. si il y en a trop, ça saute. » je triture nerveusement le bas de mon t-shirt. wall-e a l'air d'être quelqu'un d'adorable, mais je ne le connais pas et là dans le noir sans savoir ce qu'il se passe, je suis pas forcément rassurée des masses. moi qui me prétend aventurière. tsss. « ils n'ont pas prévenu non. par contre j'ai des bougies chez moi. tu en veux ? » j'ose pas bouger. wall-e est déstabilisant. il a réussi à me faire culpabiliser quant au fait que je mets la musique trop fort sans pour autant être méchant. au contraire, il parait terriblement gentil. « je suis désolée. » je souris timidement. jsuis conne. il peut toujours pas me voir. enfin je crois. « pour la musique. » je précise.

le wall-e, il se sent un peu mal-à-l'aise. il n'a jamais eu autant de véritable discussions en une vie que ces derniers jours et il a presque l'impression d'avoir atteint son quota. comme si, dans son compteur, une certaine limite avait été imposé. ses docteurs sont-ils affreux à ce point ? possible. alors il joue avec le bas de son t-shirt, baisse les yeux. puis, ça le gêne aussi, de ne pas voir à quoi elle ressemble, absolem. wall-e n'a jamais été capable de voir quoi que ce soit dans le noir et depuis qu'il est là, il n'a jamais vraiment cherché à aller à la rencontre des autres. il aurait aimé mais il avait juste un peu trop peur. ah il soupire, avec tout ce qui tourne chez lui, est-ce que ce serait de sa faute ? pourtant, il n'a pas grand chose qui consomme beaucoup. c'est peut être de ma faute alors. il passe nerveusement ses doigts dans ses cheveux. j'ai tellement de trucs en marche que bon...ceci dit, ça ne m'est jamais arrivé auparavant. il se demande quelques instant si la coupure compte durer longtemps. si l’électricité ne revient jamais. comment va t-il faire pour poster les prochains chapitre de son roman ? c'est toute sa vie qui est pause. il lève rapidement la tête. oui...j'en veux bien, si ça ne te dérange pas hein... il a toujours peur que les bon gestes à son égard ne soient rien d'autre que la BA de la journée. dans le genre, allons aider le drôle de voisin, le ciel me le rendra.. ne t'excuse pas...pourquoi s'excuse t-elle ? il s'en fou. il l'a pensé très fort. puis. ça ne me dérange pas...j'aime bien. il souffle, la lumière commence à lui manquer. je déteste le silence.

wall-e semble complètement déstabilisé et mal à l'aise. j' aperçois sa silhouette se tortiller dans tous les sens. il est persuadé que la coupure vient de chez lui. je fronce les sourcils. j'ai envie de le prendre dans mes bras et de lui faire un gros calin. le genre de câlin qu'on fait à une peluche ou à un enfant qui s'est fait mal. « si ça n'a jamais sauté avant, ça ne vient pas de chez toi wall-e. ça doit venir de quelqu'un d'autre ou alors c'est délibéré. 'fin ça vient de la mairie ou un truc comma ça . » il veut des bougies. je rentre rapidement dans mon appartement et farfouille dans un tiroir du buffet dans le salon. je reviens dans le couloir avec une douzaine de bougies, des cierges autant que des bougies à phospho. je tends timidement le tout à wall-e. j'ai l'impression que le moindre geste brusque pourrait l'effrayer. « si tu n'en as pas assez, il en reste pleins chez moi, n'hésite pas à demander. » je souris dans le noir. je finis par m'adosser au mur et je m'assois par terre. ma musique ne le dérange pas. « tu veux qu'on discute ? j'ai peut-être un peu de musique sur mon portable si tu veux. ou je te laisse tranquille si tu préfères. » je croise les jambes et joue avec le bas de mon t-shirt. dans tous les cas on est parti pour attendre un bon moment le rétablissement du courant. je préfère passer le temps avec wall-e qui a l'air adorable plutôt que seule chez moi.