C'est une journée grise, mais chaude et humide. C'est mon jour de congé, mais pas ma colocataire alors l'appartement est vide et silencieux. Je préfère sortir plutôt que de perdre mon temps à regarder la télévision... Vêtue de vêtements de sports et une bouteille d'eau en main, je pars en bus vers le quartier Hollywell. Southporth est loin d'être le lieu le plus beau et le plus attrayant pour ceux qui aiment voir de la verdure, et je n'avais surtout pas envie d'avoir les pieds dans le sable entourée d'un paquet de touriste en maillot de bain. Hollywell me convient davantage, c'est calme et surtout, il y a des parcs. C'est justement là où je me dirige, un grand parc que j'adore qui a bien-sûr quelques jeux pour enfants, mais surtout un grand terrain vert et même un petit sous-bois. J'arrive, il y a quelques enfants qui jouent dans les structures au loin alors je m'installe à l'autre extrémité du parc, je dépose ma bouteille d'eau au sol, j'enlève mes tongs et je fais quelques étirement avant de me lancer dans une série d'acrobaties et de pas de danse.

Les nuages couvraient le soleil d’une tristesse étalée. Un jour parfait pour sortir Liam de la cage qu’était sa chambre. Marchant d’un air blasé, il regardait les gens courir et le contourner comme s’il n’était qu’un vulgaire obstacle. Quelques fonctionnaires lui foncèrent même dedans en lui jurant des insultes. Ce n’était pas de sa faute si pour eux le temps était de l’argent. Voyant que sa présence dérangeait les rues, Liam se dirigea vers les parcs d’Hollywell. D’un coup, une tête blonde passa à côté de lui et attira son attention. Le jeune Australien s’arrêta et admira cette marguerite germée au fond du parc. Elle dansait telle une nymphe dans son bois. Liam alla près d’elle et il la dévisagea avec un grand sourire béat. « Tu ressembles à une abeille », dit-il timidement. Se rencontrant de sa bêtise, l’artiste descendit son regard et il rougissait. Mais ce qu’il pouvait être bête ! Au lieu de partir, il restait là dans sa singularité.

Je prend rarement le temps de m'exercer à l'extérieur, puisque j'ai toujours accès à un studio. Mais ici je ne connais personne, personne ne me juge, je suis libre de mes mouvements. J'aime sentir la sensation de l'herbe sous mes pieds, ainsi que la petite brise qui me rafraîchit. Je ferme les yeux un instant et laisse mon corps s'exprimer librement, sans même réfléchir au mouvement suivant. Je perçois au loin des pas s'approchant peu à peu, mais je n'y prête aucune attention, croyant que cette personne allait simplement passer à côté, mais non. J'ouvre les yeux lorsque j'entend la voix du garçon s'adressant à moi. Je le dévisage pendant quelques secondes, mais son regard s'était dérobé au mien. Je fronce les sourcils en réfléchissant à ce qu'il venait de dire, et je souris en coin. « Euh... merci? Je suppose que c'est un compliment? » Je me penche pour attraper mon eau embouteillée et j'en prend une petite gorgée, fixant toujours cet étrange garçon devant moi.

Un compliment ? Pour Liam, c’était beaucoup plus que ça. C’était une étape qu’il avait franchie avant son temps. Cela faisait un bon moment, depuis qu’il s’était enfermé, que l’artiste n’avait pas approché quelqu’un. Son pied piétinait l’herbe tranquillement de manière timide. Liam regarda le cou de la jeune fille déglutir. Le soleil frappait sa peau et il dénotait les perles d’eau ruisselante sur sa soie. Ses cheveux couleur miel aiguisait le désir à Liam de les toucher ; de la toucher. « Un compliment serait un euphémisme. » Dit-il timidement « Tu dois être l’apothéose de ma journée. », enchaîna-t-il tout en souriant. Puis, son regard remonta et resta en contact avec celui de la fille avant de recourir ailleurs. Liam s’avança de quelques pas vers l’abeille tout en regardant ses chaussures de sport. « Tu n’es pas le genre d’abeille qui tue, tu es plutôt celle qui butine. N’est-ce pas ? » demanda-t-il sur un ton qui se voulait séducteur.

Après seulement quelques minutes à l'observer, je viens à la conclusion que soit ce garçon me fait une mauvaise blague, soit il est vraiment très timide. Je reste tout de même sans voix alors qu'il prend à nouveau la parole, je ne crois pas avoir déjà discuté avec une personne qui use de tant de vocabulaire, j'ai l'impression de faire face à un auteur. Je trouve ça tout à fait charmant... Ma main passe dans mes cheveux pour mettre une mèche derrière mon oreille et j'émet un petit rire cristallin. Il s'approche de moi en évitant mon regard, mais moi je ne peux m'empêcher de le dévisager, il m'intrigue énormément. tu n’es pas le genre d’abeille qui tue, tu es plutôt celle qui butine. n’est-ce pas ? J'étouffe mon fou rire, je ne sais pas tout à fait quoi lui répondre, alors j'hoche simplement la tête en baissant mon regard vers le sol. « Eh bien, je suppose que oui. » De plus en plus curieux....

Son regard avait encore baissé. L’artiste n’était plus qu’à quelques pouces de la jeune sportive. Le soleil tua les nuages ainsi recouvrant les deux inconnus de sa chaleur légendaire. Donc, elle butinait… flânait… expérimentait… « Je préfère celles qui tuent, au moins quand c’est fini… C’est fini. » Liam passa sa main dans ses cheveux et il se demanda jusqu’où cette conversation pouvait continuer. Il tendit la main fièrement comme deux hommes d’affaires le feraient. « Hawkins… Liam Hawkins. » Un sourire tendu se plaça sur son visage. Une fois les présentations faites, il se recula afin de ne pas effrayer la blonde. Le regret de ne pas avoir avec lui son calepin à dessin le rongeait. « Vous pensez quoi des artistes, mademoiselle Abeille ? », lançait-il sur un ton comique. Il aimerait bien peinturer ce doux visage mielleux. L’artiste pouvait sentir la peinture à l’huile bruler sous ses doigts. Petite marguerite, laisse-moi te cueillir, ne s’empêchait-il pas de penser.

Il s'approche lentement de moi tandis que je reste immobile, comme un chevreuil ébloui par des phares de voiture. En espérant que la collision ne soit pas trop violente. Je préfère celles qui tuent, au moins quand c’est fini… C’est fini. J'hoche simplement de la tête, ne sachant pas trop quoi répondre. Je ne suis même pas certaine de comprendre ce qu'il veut vraiment dire avec cette histoire d'abeilles. Il se présente. Je lui serre la main en souriant, toujours silencieuse. Finalement je ne pense pas qu'il se moque de moi, il est simplement introverti. « Tu peux m'appeler Lola... » J'avais oublié de me présenter il y a quelques secondes à peine. Ce n'est pas que mademoiselle abeille me déplaise, mais... je sais pas trop en fait. Il peut bien m'appeler comme il le souhaite finalement. « Eh bien... je considère la danse comme une forme d'art, alors je suppose que j'en pense du bien? »