T'es coincé chez toi depuis trois jours à cause de cette foutue cheville qui te fait un mal de chien. T'as évité le plâtre de peu alors tu te contente de rester le cul dans ton canapé à regarder des trucs débiles à la télé. Tes deux béquilles sont posées par terre, t'aime pas ces machins alors tu mets pas ton nez dehors. Devant toi la table basse est recouverte de canettes de bières vides et de paquet de chips. Tu prends une gorgée et tu fais la grimace, cette foutue bière est pas fraiche mais t'as la flemme de te lever pour aller jusqu'au frigo. T'aurais bien besoin qu'une infirmière sexy vient te soigner mais les filles ont déserter la maison quand tu t'es ramené avec tes béquilles, c'est sûr que ton charisme en a pris un coup.

Sephora c’est la fille qui a limite le cœur sur la main. Alors le jour où à la rédaction on entend un « tu sais, mon voisin là… bah il s’est bien ramassé apparemment. Je l’ai vu avec des béquilles et tout, et c’est devenu bien calme chez lui. Il sort même plus, dis toi », la question ne se pose pas. Elle y fera un détour voir s’il est toujours en vie. Bon c’est plus sa nature de journaliste que la fille attentionnée, du coup. Et c’est pourquoi, elle se retrouve à ouvrir cette porte après avoir quitté le travail, avec toutes les bonnes intentions du monde et sans se soucier à l’adage « trop bonne, trop conne » (elle est quand même tout sauf la fameuse infirmière sexy). « Y’a quelqu’un ? » En l'absence de réponse, la jeune femme pourra toujours se préparer psychologiquement à retrouver un cadavre.

T'es comme un zombie ou alors un gros tas. Ton pack de bière est posé sur le canapé à côté de toi. Ta jambe malade est appuyée sur la table base et t'as les yeux un peu rougis à force d'être scotché à la télé. Le seul truc positif qui se présente c'est les anti-douleurs que le médecin t'as donner en précisant bien qu'il ne faut pas en prendre plus de trois par jour. Bien sûr toi t'es un rebelle alors t'en a pris le double ou le triple, tu sais plus trop et tu planes, un peu. C'est pour ça que quand t'entend une voix inconnue dans ta maison tu te demandes si t'as pas un peu abusé, le médecin n'avait pas parlé d'hallucination. Tu tournes la tête et tu regardes la blonde qui s'est introduite chez toi, c'est qui celle là ? Tu plisses les yeux et tu prends une gorgée de bière. j'ai pas commandé de streap-teaseuse, t'as dû te tromper de maison. Tu reposes tes yeux sur la télé en poussant un soupir.

Elle pensait avoir vu et entendu tous les accueils possibles et inimaginables, mais celui-là, on ne le luit avait encore jamais sorti. Une strip-teaseuse ? Il avait de quoi la rendre bouche bée. « Et t’as l’air bel et bien vivant. Pas d’article à sensation pour moi. » Dit ainsi, je vous jure qu’elle s’était traîner jusqu’ici plus pour sa conscience que sa profession. Bon après, la jeune femme pouvait toujours faire quelque chose de plus personnel et comique, avec quelques photos à l’appuie, comme quoi elle n’était pas la personne la plus bordélique de cette planète, ou rester dans le domaine du sérieux et parler de ces jeunes qui restent cloitrés chez eux à boire devant des émissions moyennes. « Une strip-teaseuse, sérieusement ? » Ouais bon, elle ne s’est pas non plus remis de cette qualification.

Finalement c'est pas une hallucination, cette meuf est bien réelle et tu te demandes qui c'est. Son visage t'es totalement inconnu et pourtant elle est debout dans ton salon à parler d'un article ou tu sais pas trop quoi. Tu te tournes et tu la regarde, de haut en bas. Elle n'a pas l'air d'une streap-teaseuse mais plutôt d'une bourge assez sage. putain mais t'es qui toi ? peu de personnes entrent dans ta maison à part les nombreuses filles que tu ramène dans ton lit mais celle là tu la connais pas, t'en est certain. Tu te dandines sur ton canapé et tu te lève sur une jambe, t'as l'air bien mignon comme ça.

Elle hausse un sourcil et se fait la promesse de ne pas relever son « putain » et son manque certain de tact ou d’accueil (quoiqu’elle ne s’attendait pas à un type tout sourire non plus). « Une de tes voisines doit bosser avec moi ou un truc du genre. » La jeune femme secoue la tête pour passer outre les détails. « La rumeur était du genre : on le voit plus, pas de signe d’activité chez lui. Et au lieu de se renseigner, elle ne se bouge pas elle-même. Ce serait con de ne pas vérifier si l’inconnu en question agonisait chez lui ou pas. » Okay, l’histoire doit sembler être tirée par les cheveux racontée ainsi, mais grosso modo c’était bien la raison de cette visite impromptue. « Mais au final, t’es juste en vie, juste incapable de te bouger et de très bonne humeur. »

Ok, quelqu'un a dit ça mais pourquoi cette fille que tu connais pas est chez toi ? Tu sautilles sur un pied pour aller jusqu'à une étagère ou t’attrape une petite boite avant de revenir sur le canapé. Putain de pied. Et ça t'arrive souvent de débarquer chez des gens que tu connais pas ? T'ouvres la boite et tu sors un pochon de weed avec des feuilles et tout le tralala. Cette fille à l'air franchement bizarre mais d'un côté c'est cool d'avoir un peu de compagnie. Rend toi utile, va me chercher un truc à manger. Tu souris en la regardant, autant qu'elle serve à quelque chose. Tu t'appliques à rouler ton joint tranquillement sans vraiment te soucier de la blonde, finalement t'aurais préféré qu'elle soit une streap-teaseuse, sa aurait mit un peu d'animation.

Sephora ne répond pas. Auparavant, elle se serait souciée de l’état de la personne sans pour autant lui rendre visite, privilégiant ainsi l’appel d’une ambulance ou quelque chose dans ce style. Par contre, vu le ton qu’il continue d’employer, elle ne peut pas rester silencieuse. « Et ça t’arrive d’être un minimum aimable ? » En même temps, la jeune femme ne sait pas à qui elle a à faire et son comportement ne l’incite pas à le connaître davantage. Elle cherche du regard où se pourrait trouver la cuisine sans pour autant s’y rendre. Enfin pas maintenant. À voir s’il continue de la traiter comme un chien ou pas. Sephora n’a rien contre faire du social, mais elle demande toujours un minimum en retour.

Tu cales ton joint entre tes lèvres et tu l'allumes avant de tirer dessus et tu regardes blondie qui râle car tu lui parles mal. Et elle veut quoi celle là, que tu te mettes à genoux devant elle ? Tu rigoles doucement. C'est bon détend ton string et soit gentille ! Plus tu rencontres de femmes et plus tu les trouves chiantes, si sa continue comme ça tu deviendra gay, les mecs sont beaucoup plus cool et ne chouine pas pour des bêtises. La blonde n'a pas l'air de vouloir bouger alors tu soupires. Tu peux me filer un truc à manger, please ? Tu tente un sourire histoire de l'amadouer un peu, aller soit gentille. Tu sais même pas si y'a quelque chose de mangeable dans tes placards, ça fait super longtemps que t'es pas aller faire les courses.

Ô miracle, elle qui n’attendait qu’un simple « s’il te plait » avait même eu le droit à un semblant de sourire. Elle hoche la tête et finit par se diriger vers la cuisine. C’est à se demander s’il vit vraiment ici ou pas : il n’y a pas grand chose dans les placards. La jeune femme revient dans le salon uniquement munie d’un paquet de chips. « Tu veux que je te fasse livrer quelque chose ? » C’est pas vraiment avec de la bière dans l’estomac qu’il ira mieux – en attendant, elle lui épargne toute leçon de moral – bien qu’elle puisse annoncer à l’autre curieuse qui doit être sa voisine que monsieur est vivant.

Elle cède enfin, de toute façon elle n'allait pas te laisser crever de faim. Elle remarque vite que tes placards sont vides alors l'option de se faire livrer est la seule possible. Ouais ce serait bien, doit y avoir de l'argent dans ma veste dans ma chambre, prend toi aussi quelque chose. T'es trop généreux mais t'as surtout pas envie de passer le rester de ta journée tout seul. T'écrase ton joint dans le fond de bouteille qui te sert de cendrier. Aufaite moi c'est Milo. Tu décolles tes yeux de la télé pour regarder la blonde ou plutôt l'examiner.

La jeune femme commencerait presque à être larguée. Il y a même pas quinze minutes de ça, elle avait cette douce sensation de l’emmerder plus que tout et voilà qu’il lui demandait de commander quelque chose pour elle, aussi. Toujours pas de réponse, c’est finalement au moment où « l’handicapé » du jour décline son identité qu’elle revient à la réalité. « Pizza, ça te va ? » Elle sort son téléphone en attendant sa réponse pour savoir qui appeler tout en se laissant tomber sur un fauteuil, à une distance quelque peu raisonnable de ce type. Sait-on jamais si elle s’est rendue chez un psychopathe… « Ah, c’est Sephora… » Autant se présenter à son tour avant qu’il ne lui donne un surnom du genre Barbie.

Yep, c'est parfait. La pizza est ton plat favoris, t'en manges tout le temps, même au petit déjeuner quand t'as la flemme de te faire chauffer des oeufs ou d'ouvrir ton paquet de céréales. Tu regardes Sephora qui commences à prendre ses aises mais pas trop, elle s'assoit sur le fauteuil opposé du canapé, ça va t'es pas non plus le grand méchant loup, quoi que. Sinon tu fais quoi dans la vie à part rendre visite a des gens que tu connais pas ? Si elle est décidée à rester, autant faire la conversation et se montrer gentil.

Sephora acquiesce. L’avantage des gars, c’est qu’ils ne sont pas compliqués pour manger. Elle appelle la pizzeria du coin : quelque chose de classique pour Milo et une végétarienne pour elle. Puis, elle hausse un sourcil à sa question : moment de sympathie ? Pourquoi pas… Ce mec est plutôt surprenant. « Je mets souvent mon nez là où il faut pas. Journaliste quoi. » D’où certainement sa venue ici. Un soupire et elle finit par se mettre un peu plus à l’aise, détendue comme s’il n’allait pas la manger. « Et toi, tu faisais quoi avant de finir par passer tes journées ici à fumer et boire ? »