bouge de là, c'est mon territoire.

« Merci pour le dîner, c'était délicieux comme toujours. » dis-je à l'intention de mes deux parents avant de leur faire la bise, une des rares manies de politesse qui me reste dans cette attitude de mec manqué. Ils me salua de coups de mains dans la noirceur du balcon et entra enfin dans la maison. Je ne perdis pas une minute de plus pour m'allumer un joint et déposer mon longboard par terre, me mettant à donner des élans avec mon pied droit pour avancer. Je fumais mon joint, le vent dans les cheveux dévalant les rues et les ruelles jusqu'à la station de train où j'avais l'intention de tager quelques wagons. Heureusement, il n'avait personne, mais des tags étaient déjà présent. Tentant de me trouver une place entre ceux-ci, je dépose mon sac par terre en prenant soin de me munir d'une canette de spray et je me mets à dessiner sans me soucier des autres dessins autour de moi. Le magot de marijuana brûlait encore par terre à mes pieds, l'odeur remontait jusqu'à mes narines ; une belle soirée s’annonçait.

Tes pieds s’enfoncent dans le gravier. Tes pas font écho au silence percutant. Dans la nuit noire, sous une lune pleine, tu te fais ombre. Tu vas exercer ton art sur quelques wagons abandonnés. C’est Ariel qui t’as convaincu que c’était un truc d’artiste de poser ta marquer sur les murs. Toi, t’as jamais vu ça comme ça. C’est juste un truc qui te libère. Où tu penses à rien. Souvent, dans tes tags, y a un truc qui ressort. Une lettre. Un symbole. Un bout du passé, pas totalement abandonné. Souvent, y a du Tansy dans tes tags. Autrefois, t’aimais bien qu’elle te regarde, avant de l’envoyer au paradis à même le sol humide. Aujourd’hui, ça signifie plus rien. C’est que des dessins, rien d’autre. Sans histoire. Sans toi et elle. Tu te rends même plus compte qu'elle est toujours là, sous tes bombes colorées. Mais quand t’arrives, tes yeux sombres se posent sur une silhouette. Bombe en main, sac au pied, elle commence à profaner ton sanctuaire. Tu mugis et t’avances plus vite, pour la rejoindre. Elle. Elle qui prend ta place, qui tague sur tes œuvres. T’arrives à sa hauteur et l’odeur de la beu s’immisce dans tes narines. Une effluve à faire gerber. T’as toujours détesté ça. Tu balances ton sac au pied de l’inconnu, égal à toi-même, énervé pour un rien. Tu fous quoi ici ? T’as pas vu qu’la place était déjà prise ?

J'étais concentré dans ce que je faisais, comme d'habitude bien loin du reste de la terre. Tous mes gestes étaient calculés, fait de façon naturelle et artistique. Je n'avais rien de précis en tête, mon esprit se laissait guider par les différentes idées qui passaient par là et les coups de vents sur ma peau en cette nuit humide. J'aimais bien la couleur du noir qui ressortait de ce wagon rouge vin, tout ça faisait tellement sombre et différent de ce que j'avais l'habitude de faire. Près de où ma main se trouvait, canette en main, il y avait un début de dessin ; non terminé et loin d'être vraiment significatif. Je ne me gêne pas et je commence à ajouter du mien à ce dessin, rien de trop exagéré, une seule ligne. Puis je fais un pas en arrière pour regarder le résultat jusqu'à date. Au même moment, je manque trébucher sur un autre sac que le mien, un sac qui venait d’apparaître sans que je m'en rende compte tellement j'était concentré, et éclatée ouais! pensai-je en me retournant pour répondre au mec qui se prenais pour quelqu'un d'autre. « Attend, t'es le président de l'Australie toi ? Parce qu'au dernière nouvelle, on a pas encore changé et c'est pas ta tête qui vas me dire quoi faire... Alors prend ton air et laisse moi continuer ! » dis-je à voix haute en ajoutant un sourire insignifiant avant de me remettre à tager tranquille.

j'archive.